Si seulement nous étions tous japonais!

Pour la 1ère fois de son Histoire, l’indice boursier japonais Nikkei 225 a explosé le palier des 50,000 points.
En l’espace de 6 mois, depuis avril de cette année, il s’est apprécié de 65% ! C’est 33 milliards de $ qui ont été canalisés vers la bourse japonaise en provenance de l’étranger.
Stagnante depuis plusieurs décennies, l’économie nippone est désormais rugissante.
Dans la stricte lignée de son prédécesseur, le visionnaire Schinzo Abe (à propos du quel j’ai énormément écrit), la Première Ministre Sanae Takaichi a mis en place un plan de 13.9 trillion yen (plus de 90 milliards de $) en projets d’infrastructure et d’expansionnisme fiscal.
Les fondements des Abenomics consistent en des dépenses Etatiques généreuses dans un contexte de politique monétaire très accommodante.
La Banque du Japon a certes aujourd’hui un taux d’intérêt directeur positif de 0.5%, mais il autorise (toujours) le financement des dépenses publiques à des tarifs extraordinairement avantageux.
En même temps, le fait qu’ils ne soient plus négatifs est indiscutablement un signal favorable à destination des entrepreneurs qui montent en puissance, et des investisseurs sur les marchés boursiers motivés par un loyer de l’argent à des niveaux plus que raisonnables. Ultime bonne nouvelle : les salaires japonais augmentent à nouveau, phénomène significatif car ils étaient en baisse réelle depuis au moins 20 ans.
Désespérément en quête de politiques de la trempe d’Abe et de Takaichi pour l’Europe !

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1. Certes, si seulement…l’espace d’un instant, vu que le temps et l’espace nippon a déjà effacé trois décennies précédemment à un choc sanitaire mondial, une guerre en Occident (conflit russo-ukrainien) ainsi qu’un choc protectionniste exacerbé via les “tariffs” (guerre économique, commerciale, et monétaire). Effectivement, Karl Marx (1818-1883) et John Maynard Keynes (1883-1946) tombaient d’accord sur ce point : l’argent est le but même de toute production et de tout service rendu. La production commence et se conclu avec l’argent. Keynes n’évoquait-il pas la “théorie monétaire de la production”? Même Milton Friedman (1912-2006), chantre de l’école monétariste et ardent défenseur du néolibéralisme rejoignait Marx et Keynes dans son appréciation du rôle crucial de l’argent.
En n’oubliant pas au passage que l’Argent est synonyme de Dette et vis et versa. Ni que l’économiste Milton Friedman, pape du monétarisme et d’une idéologie dominante, percevait la responsabilité sociale des entreprises à sa façon. Dans sa tribune du New York Times Magazine du 10 septembre 1970, Friedman avait parfaitement agencé les éléments de la thèse défendant la régulation (néo) libérale de l’entreprise capitaliste: “l’entreprise n’a qu’une responsabilité sociale, celle d’utiliser ses ressources et de mener des activités visant à maximiser ses profits (pour l’actionnaire) dans la mesure où elle respecte les règles du jeu, à savoir qu’elle livre une concurrence libre et ouverte sans escroquerie ni fraude”. Entre parenthèses, il est précisé que les profits réalisés le sont au bénéfice des actionnaires, en référence à une autre citation du monétariste Milton Friedman déclarant que la seule responsabilité sociale des dirigeants “n’est autre que celle de faire le plus d’argent possible pour leurs actionnaires” (Friedman, 1962)…
2. Ceci nous amène naturellement à un phénomène également identifié au Japon du monde d’avant, à savoir un pays lesté de problèmes structurels qui ont eu pour effet mécanique de saper reprise, croissance, inflation et confiance. Bas salaires, retraites en peau de chagrin, niveau d’instruction et de formation dégradé, population vieillissante qui consomme moins; autant de fardeaux ayant pesé lourdement sur l’économie du Japon et de bien d’autres nations dites développées. Car, en réalité, malgré des relances monétaires massives [puis budgétaires] ayant nourrit essentiellement les acteurs des marchés financiers – avec cette illusion totalement irrationnelle en la théorie du ruissellement dirigée vers l’économie réelle – l’échec japonais à relancer l’inflation aura surtout permis de révéler la mentalité des entreprises qui – elle – fut déflationniste. Puisqu’au Japon, comme dans nombre d’autres pays, notamment en Occident, ces entreprises n’ont pas cherché à prendre un peu le relais de la force publique (relance budgétaire comme courroie de transmission vitale à la relance monétaire) car elles s’avéraient déjà entièrement centrées sur leur sauvegarde et principalement focalisées sur leurs profits à court-terme.
Or, bien des experts semblent avoir aussi oublié qu’il faut bien distinguer l’inflation du renchérissement des prix à la consommation, car l’inflation est un désordre macroéconomique qui s’avère lorsque le système bancaire (composé de la banque centrale et des banques secondaires) émet trop de monnaie par rapport au produit intérieur brut. En résulte alors une dilution du pouvoir d’achat de la monnaie, même si souvent le niveau des prix à la consommation n’augmente pas, étant donné qu’une grande partie de cette somme de monnaie excédentaire est injectée sur les marchés financiers, suite à l’ouverture des lignes de crédit que les banques s’octroient entre elles (sur le marché interbancaire) pour effectuer des transactions essentiellement spéculatives. Tout à la manière de la création monétaire ex-nihilo – via les banques secondaires – pour offrir du carburant à la politique de l’offre (loi de Say), sans véritablement observer le volet de la demande (une hérésie sous l’angle de la loi offre/demande). D’ailleurs, comme suffisamment observé durant la pandémie mondiale (rupture des chaînes d’approvisionnements) où le renchérissement des prix à la consommation ne fut pas imputable à l’inflation, mais aux problèmes dont souffraient les entreprises pour satisfaire la demande sur le marché des produits. Par conséquent, ledit renchérissement n’était pas dû à des perturbations du côté de la demande mais bien de l’offre. Des excédents sur les stocks qui se sont avérés ensuite déflationniste sur les prix consécutivement aux “politiques de l’offre” (loi de Say, respectivement des débouchés) n’ayant suffisamment considéré le volet de la demande.
Voilà donc des banquiers centraux et des gouvernements qui n’auront pas suivi les recommandations de l’économiste américain Paul Samuelson, qui affirmait justement que les économistes ont deux yeux: “l’un pour regarder la demande et l’autre l’offre”. Eh oui, les dogmes ont la tête dure !!! Donc, en terme de masse monétaire à présent, les valeurs boursières se sont envolées à des sommets (sérieusement inflatées) au détriment de l’économie réelle et des dettes publiques (souveraines)…
3. Enfin et pour terminer, en incidence, si les trois flèches des Abenomics ont en bonne partie atteint leurs cibles, elles ont également eu pour conséquence de porter autrefois le ratio dette/PIB de l’Empire du Soleil levant à 250% contre 100% pour l’Europe et les Etats-Unis.
https://michelsanti.fr/banque-du-japon/japon-extraordinaire-cas-decole-macroeconomique
Mais, toutefois, avec cette spécificité bien japonaise de la dette souveraine, puisque les “Japanese Government Bonds” restaient détenus – en grande partie – par des agents économiques domestiques, comme rappelé autrefois. Selon le constat du ministre des finances, en 2016, 36.7 % des “Japanese Government Bonds” l’étaient par la Bank of Japan (BOJ), 24.7 % par les institutions financières du pays et 21.8 % par les assureurs locaux. Seuls 6.7 % des “Japanese Government Bonds” étaient aux mains d’étrangers et donc exposés à une spéculation en règle des marchés financiers.
Une situation particulièrement atypique eu égard aux autres marchés de la dette souveraine exposés aux attaques des spéculateurs compulsifs e-o aux vulture-funds dans l’attente de leur pitance.