La crise Asiatique de l’Europe

février 1, 2010 0 Par Michel Santi

L’Union Européenne subira-t-elle l’humiliation suprême consistant en l’assistance du F.M.I. en faveur d’un de ses pays membres, en l’occurrence la Grèce? Strauss-Kahn fera-t-il la leçon à Trichet et au-delà du Président de la BCE à l’ensemble des nations de l’Union ?

Car c’est bien de cela qu’il s’agit en filigrane puisque, la condition à l’intervention du FMI étant l’instauration de règles d’assainissement comme la réduction des dépenses publiques ou l’augmentation des prélèvements fiscaux, cet institut est également susceptible de monnayer sa charité par des exigences en terme de stabilisation de la devise ou de modification de la politique monétaire de ce pays. La politique monétaire Européenne étant par nature commune aux seize membres de la zone Euro, la BCE cèderait-elle à des injonctions émanant d’un FMI demandeur de taux d’intérêt Européens ou d’un Euro plus bas … et comment réagirait la fière Allemagne face à ce camouflet?

Pour autant et par delà ces questions d’ego, le risque clairement identifiable est celui d’une éventuelle contamination à d’autres pays de l’Union dont on pensait qu’ils disposaient de quelques années pour remettre de l’ordre dans leurs comptes nationaux fortement déficitaires. Les marchés ayant, dans leur infinie sagesse, tranché dans le sens contraire concernant la Grèce, des nations comme le Portugal, l’Espagne, l’Irlande (et certains pays de l’OCDE) bénéficieront-ils d’un répit ou la Grèce n’est-elle que le premier domino? Souvenons-nous de la Thaïlande en 1997 ou de la Corée en 1998 (pour ne citer qu’elles) et du contexte Asiatique global o๠la réduction massive des dépenses publiques (consécutives à l’intervention du F.M.I.) fut ressentie avec brutalité et douleur par leur population.

La politique monétaire et la mise en place de la monnaie unique étant les prérogatives de la seule BCE, l’intégration au sein de l’Union de la Grèce, – avec son économie peu développée, voire instable, en regard des autres pays de l’Ouest Européen -, s’est logiquement accompagnée d’une prime de risque sur ses obligations d’Etat quasiment équivalente à celle du Bon du Trésor Allemand. Néanmoins, cette convergence a nettement favorisé des comportements à risques en Grèce car l’investissement – et l’endettement – pouvaient dès lors s’y pratiquer à outrance au vu du faible niveau des taux d’intérêts Européens avec, pour résultante, des déficits ayant progressivement crevé et de très loin les critères du Pacte de Stabilité dont l’objectif était précisément de poser un cadre de discipline budgétaire et fiscale.

Chaque pays devait ainsi payer un certain prix pour son entrée au sein de l’Union auquel les autorités Grecques n’ont pas jugé bon de s’astreindre, permettant par exemple aux salaires de leur fonction publique de s’envoler bien au-delà de son niveau de productivité ou tolérant des conditions de refinancement excessivement motivantes… Toutefois et à mesure que le niveau de vie d’un Grec rattrapait celui d’un Allemand, il s’avérait que la forte croissance de l’économie Grecque reposait à l’évidence sur des fondations hypothétiques puisque le déficit budgétaire du pays atteignait un sommet de 15% en 2009! La conséquence inéluctable de ce train de vie à l’Américaine d’un pays devenu champion toutes catégories du non respect du Pacte de Stabilité Européen fut ainsi un refinancement de sa dette à des conditions toujours plus onéreuses puisque, dès le début de l’année 2009, les taux payés sur les Bons de l’Etat Grec devaient notablement diverger des autres obligations souveraines Européennes.

Un défaut de paiement Grec est certes une hypothèse à exclure totalement mais le sauvetage de ce pays – par le F.M.I. ou plus vraisemblablement par la BCE ou par l’Union – sera fatalement précédé d’assouplissements considérables de critères qui définissaient le sérieux et la bonne santé financière d’une Union qui en tirait une fierté légitime.

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