G 20 : Le Déclin de l’Occident

avril 5, 2009 0 Par Michel Santi

Par delà les fanfaronnades et les auto-congratulations ayant prévalu à ce G 20, sans évoquer la mise au pilori fort opportune des méchants de service que sont paradis fiscaux et hedge funds et sans négliger les très sexy listes Blanche, Grise et Noire, comment ne pas constater le vide sidéral de mesures – ou tout au moins de discussions – relatives aux déséquilibres commerciaux, aux désordres monétaires ou à la problématique cruciale des déficits publics…? De même, quelle crédibilité accorder à un Gordon Brown plaidant pour une “meilleure régulation” alors qu’il est de notoriété publique que la City de Londres ne doit sa place prédominante qu’à ces déficits de réglementation?

Chaque membre de ce G 20 ayant strictement défendu ses propres intérêts, ce sommet n’est qu’un jeu à somme nulle ayant conforté les grosses institutions financières qui continueront à recevoir les deniers du contribuable à un moindre coà»t. Déconcertant également ce G 20 qui renforce les pouvoirs d’un F.M.I. naguère taxé d’arrogance vis-à -vis des pays du Sud, invraisemblable consécration d’une institution lamentablement aveugle face à la crise des subprimes!

Pourtant, si ce sommet de Londres a incontestablement été à somme nulle pour l’Occident, il a néanmoins écrit la dernière scène d’une pièce o๠le personnage principal est désormais la Chine flanquée de l’Inde, du Brésil et de la Russie. Symbolisme cru d’un glissement de pouvoir o๠les membres du club hier très fermé des 7 sont rattrapés par la réalité. A l’image du premier conflit mondial qui a achevé de consacrer la prédominance Américaine sur le Vieux Continent, cette crise aura, pour un Occident coupable de l’avoir provoquée, des conséquences similaires à une Troisième Guerre Mondiale!

Les Etats-Unis sont toujours aujourd’hui la première économie mondiale tout comme l’Allemagne en est le premier exportateur, l’Union Européenne étant quant à elle et encore pour le moment le premier bloc en terme de flux commerciaux. Pour autant, cette crise ayant démarré en 2007 et qui affecte beaucoup plus sérieusement les pays développés que les nations dites émergeantes n’a fait qu’accélérer ce processus de transfert de pouvoir et de richesses d’un bloc à l’autre. Les pays Occidentaux et ceux du BRIC et de leurs satellites ayant connu un développement équivalent lors de la décennie dernière, le bloc des pays émergeants a distancé les pays développés voilà quelques années sachant que l’année 2009 présidera à une domination sans partage des uns aux dépens des autres…Et pour cause puisque, selon toutes les prévisions, le bloc du BRIC connaà®tra toujours la croissance en 2009 tandis que les économies Occidentales, elles, se contracteront.

De fait, la Chine, sur le point de devenir en 2009 le premier exportateur mondial, dispose d’une économie dont la taille est plus importante que l’économie Allemande depuis 2008 et dépassera très certainement l’économie Japonaise cette année, atteignant ainsi le deuxième rang mondial! Quant à l’économie Brésilienne, elle dépassera en 2010 l’économie Canadienne sachant qu’en 2020 – soit dans moins de onze ans -, l’économie Indienne occupera le troisième rang devant le Japon et juste après les Etats-Unis qui seront rétrogradés au second rang derrière la Chine.

Si les conséquences sont incalculables, les retombées sont déjà spectaculaires : Les trois premières banques au monde en terme de capitalisation ne sont-elles pas d’ores et déjà Chinoises, les autorisant ainsi, si elles le souhaitent, à reprendre dès aujourd’hui les institutions financières Occidentales les plus influentes? Ces établissements Chinois, ayant déjà largement dépassé le stade du “Too Big to Fail ” pèsent en fait déjà sur nos politiques monétaires. Par ailleurs, ces mêmes capitaux Chinois, qui prendront dans un proche avenir des participations importantes dans des fleurons de l’économie et de l’industrie Américaines et Européennes, exerceront à l’évidence une influence considérable sur la gouvernance et les stratégies de ces entreprises.

Et pourquoi pas du reste au vu de notre gouvernance catastrophique, de nos mauvais choix, de nos négligences et de notre gourmandise effrénée…? Sans même évoquer notre arrogance qui nous menait à critiquer le Brésil pour son incompétente en matière monétaire et fiscale, la Russie et l’Inde pour leur corruption et leur inefficacité ou la Chine pour ses performances écologiques et ses valeurs humanitaires déficientes? Reconnaissons que ces nations ont aujourd’hui le triomphe modeste, un Président Lula se bornant à stigmatiser ironiquement nos “banquiers aux yeux bleus”. Qui n’a pas remarqué du reste l’attitude ostensiblement déférente d’un Obama vis-à -vis de son alter ego Chinois lors de ce dernier G 20? Les Etats-Unis et leur propension à l’hyper consommation ne doivent-ils pas leur salut à l’épargne industrieuse de l’Asie?

Une certitude : le monde d’après la crise sera différent et il conviendra de jeter aux oubliettes ou de mettre au musée notre propension au risque et notre goà»t des profits substantiels. A l’avenir, le levier sera découragé, le crédit régulé, la consommation canalisée, la croissance molle et l’épargne en sera la grande bénéficiaire.

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