Un passage du témoin douloureux et traumatisant

janvier 28, 2009 0 Par Michel Santi

Que se passe-t-il au juste avec la Livre Sterling et pourquoi subit-elle actuellement ce qui est probablement la plus violente chute de son histoire? Mesurée à un panier de Devises, la monnaie Britannique a en effet dégringolé de 25% en 2008, perdant ainsi plus de valeur que lors des dévaluations du siècle dernier! Plus que lorsque le pays avait été contraint d’abandonner en 1931 le régime de l’étalon Or car la Livre avait alors perdu 24% de sa valeur, plus que lorsque, à l’issue du “mercredi noir “, elle avait dà» quitter le Système Monétaire Européen et plus que lorsque Harold Wilson avait été forcé de rassurer à la télévision ses concitoyens effrayés par la dévaluation de 1967…

La Livre Sterling a récemment atteint son plus bas niveau vis-à -vis du billet vert depuis les fameux accords du Plaza de 1985, année du reste o๠la Livre avait pratiquement touché la parité. La chute de la Livre par rapport à l’Euro étant tout aussi spectaculaire puisqu’elle a frôlé la parité, venant de 1.35 Euro pour 1 Livre il y a une année…

Cette descente aux enfers est très prosaïquement la conséquence – ou le reflet – de la conjoncture économique du pays qui connaà®t sa crise immobilière la plus forte depuis les années 30. La récession y est implacable, indiscutable : le chômage dépassera cette année le cap des 2 millions de demandeurs d’emplois dans un contexte o๠la consommation s’effondre et o๠les flux de capitaux hors du pays s’intensifient…En d’autres circonstances, cette chute de la Livre n’aurait pas été interprétée comme un symptôme de maladie en l’occurrence la récession – mais comme un remède!

Il est vrai qu’un affaissement de la valorisation de la Devise Britannique aurait certainement dopé les exportations devenues moins coà»teuses pour les acheteurs étrangers. En effet, la production Britannique devient aujourd’hui aussi bon marché que les biens manufacturés en Europe de l’Est grâce à la dégringolade de la Livre, situation similaire du reste pour le secteur des services Britanniques ( financiers, légaux ) qui devient également très compétitifs…Dès lors, ce gain de compétitivité des industries Britanniques aurait été susceptible de relancer l’économie du pays en dépit de la contraction du secteur industriel national survenu dans les 80 et 90. Cependant, les flux commerciaux mondiaux ont eux aussi subi un frein quasiment sans précédent du fait d’une récession globale ayant asséché commerce international et flux financiers depuis les Etats-Unis à l’Europe en passant par le continent Asiatique…En fait, les dirigeants Britanniques ayant malencontreusement axé l’activité de leur pays sur les services financiers paient à présent le prix d’une économie essentiellement “mono produit “…

Cette crise que traverse la Grande Bretagne et témoignée par la dégringolade de leur Devise n’est devenue critique que lors de ces dernières semaines car la dépréciation de la Livre était jusque là perçue par la majorité des observateurs comme une “saine dévaluation “, à l’image de sa chute ayant précipité son départ du SME en 1992, chute qui avait inauguré une période de prospérité pour la City et pour l’ensemble du pays…Cette dégringolade s’est toutefois transformée en dérapage incontrôlé du fait de la fuite d’investisseurs internationaux ayant perdu toute confiance en la capacité du pays à surmonter rapidement cette récession. En fait, la situation a véritablement basculé il y a quelques jours à l’issue de l’annonce du second plan de sauvetage de ses banques par le Gouvernement Britannique : Ce qui avait été considéré comme une dévaluation compétitive de la Livre fut dès lors perçu comme un signe annonciateur de l’insolvabilité Britannique!

L’événement est en soi historique car la Grande Bretagne a – depuis des temps immémoriaux – été considérée avec respect comme une nation forte, solvable, comme un “bon risque ” en somme n’ayant aucun point commun avec des nations comme l’Argentine ou la Russie faisant régulièrement défaut sur leurs obligations respectives. La réputation de la Grande Bretagne, un des meilleurs débiteurs au monde il y a encore peu de temps, est à présent d’autant plus hypothéquée que les agences de notation internationales ne nient pas les rumeurs persistantes de rétrogradation de son rating! De fait, le rating de sa dette est absolument crucial pour une économie Britannique qui, avec 7.7 milliards de Livres de déficit budgétaire, dépense bien plus qu’elle ne peut générer et qui donc est dépendante de la motivation des investisseurs étrangers…Le niveau de vie des citoyens Britanniques est-il sur le point de se dégrader du fait d’une difficulté grandissante de leur Etat à financer son et leur train de vie?

Méditons cette admonestation que lançait Gordon Brown en 1992 à l’attention de ses adversaires Conservateurs : ” Une Devise faible est le reflet d’une économie faible, elle-même résultante d’un Gouvernement faible “…

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