Les recapitalisations des banques ne suffiront pas à éviter la récession

novembre 30, 2008 0 Par Michel Santi

L’indice des prix à la consommation dans nos pays Occidentaux est à son niveau le plus bas depuis une quinzaine d’années et la BCE devrait baisser très substantiellement ses taux d’intérêts cette semaine, certains évoquant une baisse de 0.75 points de base. Ces baisses des prix de l’énergie, de l’alimentation, des tarifs aériens ou des voitures d’occasion ont pour objectif de séduire un consommateur atteint de frilosité extrême dans une conjoncture o๠déflation, récession et liquidation d’actifs font désormais partie de notre vocabulaire quotidien…

Les bourses connaissent un répit, selon moi, temporaire et il ne fait point de doute que la récession globalisée sera très prochainement confirmée par une poursuite de la dégringolade des indices et que la déflation sera attestée par des indices d’inflation négatifs.

Le danger vient toutefois de ce “deleveraging” généralisé, soit de ces liquidations d’actifs frénétiques, agissant sur les marchés – et sur l’économie réelle – avec une violence digne d’une avalanche. De fait, après la phase subprimes à proprement parler, après la phase assèchement du crédit, la phase deleveraging marque au fer rouge notre époque tout en inaugurant une ère nouvelle qui sera caractérisée par un seul mot, l’austérité.

Il est vrai qu’une telle masse de dettes a été accumulée durant les bonnes périodes que ce processus de liquidations d’actifs en vue du remboursement – souvent forcé – de ces dettes a encore de beaux jours devant lui…Entre 1983 et 2007, le ratio du crédit des privés et des entreprises ramené au P.I.B. des pays du G-7 et de la Chine a ainsi explosé de 92 à 155%!

Cercle vicieux et aisé à comprendre : Comme les banques ne prêtent plus, le prix des avoirs financés par les crédits s’effondrent. Cette chute dans la valorisation des actifs nuit bien-sà»r aux bilans des banques car, hormis le fait qu’elles détiennent elles-mêmes et pour leur propre compte ce type d’actifs, elles doivent en outre assumer le coà»t de multiples crédits non remboursés par des débiteurs sinistrés du fait de la dégringolade de leurs avoirs…

Selon le F.M.I., les banques à travers le monde ont dà» provisionner 580 milliards de dollars de créances non remboursables depuis le démarrage de la crise jusqu’ à fin Septembre 2008 mais ce chiffre est condamné à s’aggraver précisément du fait de la chute des valeurs boursières survenue essentiellement le mois suivant. Cependant, à mesure que les bilans des établissements bancaires sont affectés, ils sont logiquement conduits à prêter de moins en moins, cette raréfaction du crédit touchant non seulement le banal spéculateur mais aussi l’entreprise ayant un besoin vital de financement et le consommateur misant sur un petit crédit pour changer de voiture…

La boucle est ainsi bouclée car la jonction entre deleveraging et récession est ainsi évidente. Pourtant, le diable n’a pas encore fini de se mordre la queue car les pertes des banques se creuseront encore plus à cause de cette récession : Selon la banque japonaise Nomura, les seules banques Européennes devraient subir une perte de 475 milliards d’Euros sur ces quatre prochaines années du fait de la récession. Les banques américaines, quant à elles, devraient connaà®tre une situation encore plus dramatique car les prix de l’immobilier sont encore loin d’être stabilisés aux Etats-Unis. Ce chiffre de pertes globales des banques de 580 milliards de dollars pourrait donc doubler – voire tripler – dans les mois et années à venir, conduisant les établissements bancaires à encore moins de crédit, phénomène qui ne fera évidemment qu’aggraver la récession…

Les recapitalisations des banques opérées de manière dramatique et spectaculaire – la dernière en date étant le géant Citibank la semaine dernière – ont certes contribué à diluer la panique. Néanmoins, ces prises de participation n’ont pas permis d’enrayer le processus implacable du deleveraging car les investisseurs et spéculateurs mondiaux ont compris que ces fonds injectés ne font que combler les trous – parfois les gouffres – figurant au bilan des banques. Or ce n’est pas en se limitant à du remplissage cosmétique de bilan que l’on encouragera les banques à renouer avec un crédit pourtant indispensable au fonctionnement de nos économies.

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