Etats-Unis : le trou noir

septembre 30, 2008 0 Par Michel Santi

Les évènements se bousculent à une telle cadence que ce que nous écrivons aujourd’hui semblera, dans une semaine, avoir été écrit il y a dix ans! Ainsi, la défection d’une portion importante des Républicains a-t-elle enterré le plan à 700 milliards de dollars du secrétaire d’Etat US au Trésor Paulson tout en laissant le marché régler ses propres problèmes. Le cataclysme prédit par Paulson et par son acolyte Bernanke, Président de la Fed, en cas de rejet de ce plan aura-t-il lieu ou les marchés retrouveront leur équilibre après un violent coup de tabac?

Le château de cartes semble sur le point de s’effondrer sous le poids du coà»t démesuré de six années de guerre en Iraq, de milliards de dollars dépensés en nationalisations d’institutions financières et de gaspillage du Trésor Public. La dette américaine est comme un abà®me sans fin et le seul espoir des Etats-Unis, totalement dépendants de la charité des étrangers, est que ces investisseurs se persuadent que le navire est tout simplement trop important pour couler…George W. Bush pourra se targuer d’avoir précipité son pays dans une série de désastres, le dernier en date étant la crise financière la plus aigue depuis la Grande Dépression…Avec lui, l’incompétente et l’ineptie auront réellement atteint des sommets historiques. Le monde entier souffre aujourd’hui de la déréglementation à outrance prônée par les administrations américaines successives : Dans quel pays ailleurs qu’aux Etats-Unis aurait-on été capable de transformer des crédits hypothécaires insolvables en titres AAA?

Il serait judicieux de clôturer les marchés financiers mondiaux jusqu’à la prochaine élection présidentielle US…élection qui se terminera probablement en bain de sang pour les Républicains. Obama bénéficiait certes d’une avance confortable il y quelques semaines mais il est très vraisemblable que la décision prise par l’administration Bush d’abandonner Lehman à son sort aura scellé le destin de cette élection, Paulson ayant ainsi achevé de clouer le cercueil de McCain! Du reste, une rumeur court à Washington selon laquelle les Républicains, sà»rs de la victoire d’Obama, n’ont pas voulu lui faire cadeau de ce plan à 700 milliards qui lui aurait permis de sortir le pays du marasme et d’en tirer ainsi tous les avantages. Pourquoi nul n’évoque-t-il jamais le courage du capitaine du Titanic pour son choix de couler avec son navire?

Le système financier se doit d’être revu en profondeur et des questions simples – mais fondamentales – doivent être posées : En quoi les marchés sont-ils bénéfiques, en quoi sont-ils néfastes? Quelles conditions sont-elles requises afin que les marchés fonctionnent de manière efficiente? Quel rôle le marché financier joue-t-il dans l’économie réelle? Quelle est vraiment la valeur de l’argent? Peut-être suffirait-il de ne prendre que la moitié de 700 milliards de dollars pour bâtir quelque chose de tangible, qui ne soit pas qu’une série de chiffres sur un écran d’ordinateur?

Les Etats-Unis ont-ils le leadership pour poser ces questions fondamentales? Il y a fort à craindre – et le coup d’Etat du rejet de ce plan par le Congrès le prouve – que cette crise financière ne se double d’une crise politique, avec deux candidats à l’investiture suprême eux-même en manque d’inspiration…Dans un tel contexte, Keynes aurait dit : ” L’irrationalité du Congrès peut perdurer longtemps encore après la faillite de l’Amérique “. L’incompétence de la quasi-totalité des politiciens n’augure rien de bon pour l’homme de la rue qui se rend à présent compte que la solution à ses problèmes ne se trouve pas à Washington. Laisser les bourses dégringoler de 30% semble être la meilleure réponse car la confiance a disparu! C’est en effet l’ensemble du paradigme de la prise de décision qui s’effondre et ce phénomène est en soi encore plus grave que la crise financière. Le peuple américain doit impérativement – et rapidement – se trouver un leadership politique responsable s’il ne souhaite pas finir comme ces pays Africains dont les dirigeants conduisent des Mercedes rutilantes même s’ils ne disposent que de très peu de routes goudronnées…

Que la dernière personne à avoir quitté les Etats-Unis n’oublie pas d’éteindre les lumières.

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