Il y a quelque chose de pourri…
Durant les années 70, le système bancaire américain s’est considérablement enrichi en jouant l’intermédiaire entre les pays exportateurs de Pétrole aux comptes largement excédentaires et les pays pauvres en quête de financements. Ce recyclage de Pétro-Dollars provenant de nations émergeantes riches en Pétrole et en Gaz en direction du système financier US s’était accentué ces dernières années.
C’est donc dans ce contexte de liquidités surabondantes en quête de placements qu’une course effrénée au profit est passée à la vitesse supérieure au début de ce siècle car les “hedge funds “ou fonds spéculatifs ont substantiellement entamé les profits des banques traditionnelles du fait de paris toujours plus risqués contractés par les gérants de ces fonds. Au même moment, une certaine catégorie d’institutions – parmi lesquelles la très prestigieuse Goldman Sachs – se détournait de la banque d’investissement pour faire des profits gigantesques dans le domaine des fusions/acquisitions ou “private equity ” ainsi que dans des opérations boursières financées par leurs fonds propres. Dans un contexte o๠Goldman Sachs et les fonds spéculatifs enregistraient des bénéfices sans précédents, le banquier d’investissement classique se sentait frustré d’être le parent pauvre de la finance, quand il n’était pas mis sous pression par ses propres actionnaires jaloux des profits générés par les banques comme Goldman…
Ainsi, l’ancien patron de Merrill Lynch, O’Neal, blâmait-il régulièrement ses collaborateurs incapables d’atteindre les bénéfices de Goldman Sachs! Quant à l’ancienne numéro deux de Morgan Stanley, Zoé Cruz, elle se plaisait à mesurer les performances de sa banque à l’aune de celles de Goldman Sachs! La résultante a donc consisté en une prise de risques considérables de la part de ces institutions alors même qu’une des raisons principales du succès d’entreprises telles que Goldman résidait précisément dans sa politique disciplinée de “risk management” ou gestion des risques. Aspirées dans le tourbillon de cette course aux profits, ces établissements négligeaient leur règle d’or selon laquelle tout développement et bénéfices stables devaient nécessairement reposer sur une stratégie à moyen terme, en tout cas sur une stratégie ne cédant à aucune précipitation.
C’est pourtant le contre pieds de cette attitude qu’ont adoptée les banques sinistrées par la crise actuelle car il y a seulement six ans pratiquement aucune d’entre elles n’était impliquée dans le marché des subprimes, encore moins dans la “titrisation” des prêts immobiliers! Ne voilà -t-il pas que ces mêmes banques devenaient en 2006 les grands noms du marché des subprimes, rejoignant et dépassant tous leurs concurrents sur le plan des profits générés!
Cependant, dans ce marché neuf, sans grande visibilité et qui s’est développé très rapidement, les banquiers en question commettaient tout une gamme d’erreurs dont celle de ne pas mettre en place un système de contrôle des risques à même de tirer la sonnette d’alarme afin d’éviter des dégâts irréversibles. Ces établissements ayant commis ce type de fautes ou de négligences inadmissibles et qui ont évidemment été les plus exposés sont aujourd’hui sur le point d’être nationalisées et donc d’une certaine manière absous – avec les deniers publics…
Par exemple et pour ne citer que lui -, le groupe UBS s’était profondément engagé dans l’immobilier résidentiel Américain il y a de cela cinq ans, non du fait d’une vision stratégique privilégiant ce marché, mais tout simplement parce que ce marché résidentiel était le plus facile à pénétrer en termes de subprimes et de titrisations et donc de profits immédiats! Ces agissements, pour le moins peu professionnels, dont les retombées nous affectent tous ont donc été tout bonnement sous tendus par l’appât du gain car les établissements ayant le mieux résisté à la crise sont aussi ceux qui se sont révélés les moins gourmands et qui ne se sont pas lancés à corps perdus dans une quête exacerbée du profit au mépris des règles élémentaires propres à toute bonne gouvernance.
Du reste, ce phénomène n’est nullement l’apanage du seul système bancaire américain car le monde de la finance Européenne est plus que jamais empêtré dans cette vaste escroquerie que sont les subprimes et autres prêts consentis à des débiteurs ( privés et institutionnels ) peu solvables ! Effectivement, une portion importante des immenses réserves chinoises ainsi que des Pétro-Euros ont-ils été acheminés vers les emprunteurs subprimes de l’Europe de l’Est via le système bancaire Européen. Ces investissements étant justifiés par la forte croissance de ces nations fortement motivées par leur adhésion prochaine à l’Union Européenne.
Quand des professionnels reconnus de la finance en sont pratiquement réduits à vendre leurs établissements à l’encan pour leur éviter la faillite, quand des fleurons prestigieux comme Citibank voient leur titre passer en-dessous de 1 dollar, la seule solution qui reste aux pouvoirs publics – dont ce n’est pourtant pas le rôle dans un monde libéral – est de mettre en place de plus en plus de procédures pour contrôler à l’avenir ces mêmes professionnels.
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