Nationaliser les banques, pour qu’elles s’intéressent enfin à l’économie ?

Nationaliser les banques, pour qu’elles s’intéressent enfin à l’économie ?

décembre 2, 2013 0 Par Michel Santi

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Les économies occidentales sont aujourd’hui enfoncées dans une trappe de liquidités. Phénomène classique – voire authentique cas d’école- où, du fait de taux d’intérêt tout proches du zéro absolu, les banques centrales ne disposent plus que d’une munition ultime. Celle qui consiste à injecter des liquidités dans le système – en d’autres termes à faire fonctionner la planche à billets virtuels- afin de soulager des banques encore empêtrées dans leurs créances toxiques. Pour autant, l’objectif initial poursuivi par les banques centrales – à savoir le rétablissement de la croissance économique – se retrouve aujourd’hui dévoyé puisque cette création monétaire intensive profite bien plus à l’appréciation spectaculaire des marchés boursiers qui sont propulsés à des records historiques, ou en tout cas à des niveaux en déconnection totale avec l’économie réelle.

En effet, c’est la récession qui règne toujours dans nombre de nations aux économies dites « intégrées » (comme dans l’Union européenne) et, ce, en dépit de baisses de taux quantitatives se pratiquant généreusement depuis cinq ans. Pire encore puisque ces économies se retrouvent aujourd’hui comme figées dans une trappe de liquidités qui semble absorber – comme dans un gigantesque trou noir cosmique ! – la quasi-totalité des liquidités désespérément crées par les banques centrales. Pourtant, en dépit de ces sommes pharamineuses qui semblent évoluer dans un circuit fermé et qui semblent ne profiter qu’à une minorité infinitésimale, les banques centrales poursuivent inlassablement leur quête du graal. Leur but ultime étant l’amélioration de ce fameux « sentiment de richesse » – c’est-à-dire tout bêtement de la confiance-, préalable incontournable à toute reprise de l’économie.

Bien conscientes que le système bancaire ne joue quasiment plus son rôle d’intermédiation consistant à répercuter ces liquidités en direction de la vraie économie, les banques centrales ne disposent toutefois plus que de ce seul levier pour sortir le patient (c’est-à-dire nos économies) de son coma. En effet, même la menace de taux négatifs fait l’effet d’un « pétard mouillé » sur des banques faisant usage de ces liquidités pour gagner à tous les coups dans le grand casino des marchés financiers. Et, ce, pendant que les prêts accordés par ces mêmes établissements en faveur du secteur privé suivent une trajectoire inversement proportionnelle aux flambées boursières. Pourtant, les quelque 2.1 trillions de dollars injectés en cinq ans par la Réserve fédérale dans les banques américaines sont quantité négligeable comparés aux 15.4 trillions de dollars mis à disposition de ses banques et de son système financier par la Banque de Chine sur la même période !

Ainsi, tandis que la Fed créé 85 milliards à un rythme mensuel (dans la cadre de son dernier programme) et qu’elle a offert environ 1 trillion de dollars à ses banques ces douze derniers mois, la Banque de Chine a, pour sa part, gonflé les bilans de ses banques de 3.6 trillions de dollars. Au final, les bilans des établissements financiers chinois atteignent aujourd’hui 2.5 fois le P.I.B. chinois, à 24 trillions de dollars ! Autrement dit, pendant que toutes les attentions sont braquées sur la création monétaire US et japonaise, la Chine arrose silencieusement sa propre économie de sommes équivalant à 3 fois les dollars et les yens respectivement imprimés par la Réserve fédérale et par la Banque du Japon. Ou, pour mettre en perspective avec les injections de liquidités émanant de la Fed, de la Banque du Japon, de la Banque d’Angleterre et de la Banque centrale européenne, la création monétaire chinoise se monte au double des sommes fabriquées par ces quatre établissements.

Pour autant, le strict contrôle des changes en vigueur en Chine a permis à ces immenses liquidités de bénéficier à l’économie du pays car les banques – sous tutelle de l’Etat- sont forcées de les prêter aux entreprises et aux consommateurs nationaux. Sans vouloir prendre pour exemple le système chinois, ni la terrifiante bulle spéculative immobilière précisément gonflée du fait de l’impossibilité pour ces liquidités de quitter le pays. Doit-on pour autant en venir à menacer nos banques occidentales de nationalisations afin de les persuader à montrer enfin quelque intérêt envers l’économie réelle ? Les banques centrales occidentales doivent-elles s’inspirer du modèle chinois pour que leur intense création monétaire soit enfin couronnée de succès ? En est-en réduit à instaurer ou à rétablir des économies planifiées et contrôlées par l’Etat pour que nos banques daignent enfin assumer leur devoir élémentaire de pourvoyeuses de liquidités ?

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