
Globalisation des problèmes ?
C’est la globalisation qui crée désormais l’inflation! Car notre plus grand souci provient de la flambée des prix à l’importation.
"Celui qui a planté un arbre avant de mourir n'a pas vécu inutilement." – Proverbe africain
C’est la globalisation qui crée désormais l’inflation! Car notre plus grand souci provient de la flambée des prix à l’importation.
Salut Michel,
Au delà du différend qui nous a opposé – comme hétérodoxe et respectueusement parlant – il ne me semble pas inutile de rappeler que l’inflation (pour les orthodoxes) est un fourre-tout qui cache toujours l’essentiel. En effet, “l’inflation est la perte du pouvoir d’achat de la monnaie suite à l’augmentation de la masse monétaire au-delà de l’augmentation de la production mise en vente sur le marché des biens et services. En fait, l’indice des prix à la consommation ne mesure pas l’inflation, mais la variation de ces prix durant une période donnée, habituellement sur base annuelle”. Comme “les hétérodoxes” que nous sommes, ne pouvons l’ignorer en pointant si facilement du doigt la globalisation. Et si les prix à la pompe se sont effectivement envolés dès le début de l’offensive russe en Ukraine, pourtant Il n’y a eu aucune rupture d’approvisionnement ou de demande supplémentaire du fait de la guerre. Les investisseurs ont préféré prendre les devants et ont artificiellement fait monter la demande et les prix, alors que l’économie mondiale commençait à reprendre des couleurs à la veille du déclenchement des hostilités en Ukraine. La consommation mondiale de produits pétroliers était repartie à la hausse, même si les niveaux de demande antérieurs au Covid n’étaient encore atteints. La prévision de demande mondiale de pétrole pour le premier trimestre 2022 avait été réévaluée par l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) à 99,1 millions de barils par jour, au lieu de 96,7 consommés en 2021. Selon l’OPEP, la reprise économique en Chine menait à un regain d’attrait pour l’or noir. Un retour à une demande soutenue donc, dans un contexte où les réserves de pétrole des uns et des autres laissaient à désirer. Le rapport de l’OPEP du 15 mars 2022 indiquait que “les stocks commerciaux de pétrole de l’OCDE ont baissé pour atteindre leur niveau le plus bas depuis 5 ans”. Selon Bloomberg, “les niveaux de stocks de gazole seraient particulièrement faibles dans la zone dite Ara (Anvers, Rotterdam, Amsterdam), ce qui a une influence majeure sur les tendances et prix en Europe”. Or, si l’on en croit toujours ce rapport de l’OPEP, “l’escalade en Europe de l’Est a suscité des inquiétudes quant à une perturbation de l’approvisionnement à court terme”, avant de se faire plus précis : “Les fonds spéculatifs et autres gestionnaires de fonds ont augmenté leurs positions en prévision d’une hausse des prix du pétrole”. Toujours selon l’OPEP, les sanctions à l’égard de la Russie, notamment leur putative sortie du système bancaire Swift ont fait craindre aux investisseurs “de graves perturbations sur les exportations de pétrole brut et de produits pétroliers”. L’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) et l’Agence internationale de l’énergie (AIE) ont ainsi reconnu de concert que la montée des prix du pétrole dès les premières semaines ne s’est fondée que sur des craintes et des hypothèses, mais à aucun moment sur le moindre fait tangible.
La spéculation ayant fait son œuvre!
Mis à par l’inflation galopante sur les actifs financiers et immobiliers qui s’est exercée après la crise mondiale de 2008 avec les politiques ultra-accomodantes des banques centrales (exacerbée par l’absence du levier budgétaire), il faut reconnaître que les méthodes de calcul de l’inflation ont évolué avec le temps pour calquer à la théorie dominante (mainstream). Pourtant, l’on y a toujours trouvé de nombreuses aberrations sans aucun fondement économique, mais visant simplement à faire disparaître ou atténuer les hausses de prix bien réels depuis quarante ans. D’ailleurs la perte de pouvoir d’achat est devenue progressive chaque année pour les moins favorisés, tout comme les inégalités ne sont pas le résultat imputable au hasard ou aux seules conséquences des derniers chocs économiques. Or, si les moins nantis ressentent leur paupérisation depuis si longtemps, c’est qu’il y a bien une raison, au-delà de la seule globalisation.
https://www.centralcharts.com/img/forum/inflation-us-2015-2.gif
En rouge, c’est le “taux d’inflation officielle” aux Etats Unis et en Bleu, c’est le taux d’inflation si les méthodes utilisées en 1990 continuaient d’être appliquées dans la nouvelle méthode de calcul. Si on prend les méthodes utilisées en 1980, le résultat est encore plus édifiant (bien que le chart’ reste daté, néanmoins il illustre déjà un phénomène non négligeable)
Bien à toi
Patrick
Bonjour Raymond,
merci de ta contribution.
Mes seules certitudes sont les suivantes:
1,
nous vivons les ultimes soubresauts du capitalisme à l’ancienne que les jeunes générations actuelles vont rejeter et vomir avec ò combien de raisons.
2,
nous vivons en direct l’agonie de la République Française actuelle qui n’est en fait qu’un signe supplémentaire d’un changement de paradigme international qui cèdera semble t il la place à des régimes plus autoritaires un peu partout dans le monde…
Merci pour le partage de ta certitude précisée au point 1, Michel, à savoir que l’abject “capitalisme actionnarial” – à matrice néolibérale – a suffisamment démontré ses moult dérives afin qu’il soit honni par un large majorité, il n’empêche qu’il faudrait en passer par un allégement considérable du poids de la financiarisation au sein de l’ensemble de nos systèmes pour opérer sa mutation, ce qui reste, à mon sens, de l’ordre de l’utopie. Même si la sagesse philosophique le postule à raison.
Ce qui m’amène naturellement vers le point 2, intimement corrélé à mon postulat du premier point. Certes, “l’agonie de la République Française actuelle n’est en fait qu’un signe supplémentaire d’un changement de paradigme international qui cèdera, semble-t-il – la place à des régimes plus autoritaires un peu partout dans le monde”. En fait, “rien de nouveau sous le soleil” (tu m’excuseras cette expression populaire) si ce n’est – par contre – la vélocité du processus car comme nous le faisait savoir le non moins éminent professeur au MIT, Noam Chomsky, le formatage au modèle autoritaire s’élabore déjà lors de l’instruction (l’éducation) publique. D’ailleurs, n’a t-il jamais mis en lumière les effets négatifs, voire pervers, du modèle autoritaire de l’école qui, en imposant des pratiques éducatives particulières, ne privilégient pas la compréhension, le talent et la créativité? Penser autrement pour ne pas céder la place à une génération d’abrutis. Pour illustrer son propos, Chomsky citait l’exemple du programme éducatif américain – “No child left behind de 2001” – qui vise avant tout à enseigner pour réussir un examen. De son point de vue, ce système scolaire qui impose l’ignorance a plutôt tendance à favoriser l’endoctrinement et la formation d’individus qui seront formatés pour être à la solde d’une idéologie de nature “coercitive qui vise à empêcher le peuple d’exercer un contrôle sur le processus décisionnel dans le but de le concentrer entre les mains des aristocrates, ces individus qui méprisent le peuple et cherchent à l’éloigner du pouvoir”.
Pour Noam Chomsky, ces intellectuels formeront à leur tour des individus qui s’attacheront à légitimer et à perpétuer les valeurs d’une société industrielle dominée par le modèle technocratique où le culte des experts dominants (mainstream) occupe une place centrale. Par ailleurs, il y dénonce le nouvel esprit du temps, c’est-à-dire le système dominant de nature anti-démocratique promu par les politiques et le patronat qui privilégient la production et l’accumulation de biens ainsi que la formation “d’outils à la solde des employeurs.“ Donc rien de nouveau finalement! Par ces critiques avant-gardistes, le professeur Noam Chomsky a dénoncé depuis longtemps “la trahison des clercs”, ces universitaires, intellectuels, médias et tous les défenseurs de ce “nouvel esprit du temps” qui glorifient, propagent et légitiment un système de valeurs dont l’objectif est de conditionner et d’opprimer les individus et d’entraver l’avènement d’une société “libre, juste et démocratique”. Tu vois bien, Michel, que ce que nous traversons n’est qu’une suite logique et déjà inscrite depuis fort longtemps!
Ceci étant souligné, le professeur à Sciences Po, Jacques Généreux, a lui aussi émis une critique constructive doublée d’une solution: “La connerie économique, c’est aussi la maladie d’une société dont toutes les sphères sont contaminées par le virus de la compétition (la politique, l’usine, le bureau, l’école, la recherche, les médias). Un virus qui stimule la bêtise et pervertit la démocratie en piège à cons”. Un des antidotes existe, dit-il? “L’intelligence collective qui peut surgir de la délibération citoyenne. Sans installation de cette dernière au pouvoir, la meilleure des reconstruction sociales pourra toujours être anéantie par une prochaine génération d’abrutis”.
Patrick Raymond
Je suis heureux à titre personnel, cher Patrick, de tes commentaires et de tes références qui éclairent ce blog et lui donnent encore un peu plus de consistance et d’envergure.