
Apocalypse now ?
Le moment de vérité approche-t-il : cette purge globale des marchés financiers remettant en question fondamentalement la politique menée avec assiduité par les banques centrales depuis une dizaine d’années ? Nous vivons quand même une époque sans précédent où, avec un taux de chômage exceptionnel de 3.8%, avec la plus longue expansion économique de leur Histoire, les Etats-Unis d’Amérique – par l’entremise de la Fed – trouvent le moyen de … baisser leurs taux d’intérêt ! Je dois l’admettre : pour sauver un système infecté par les subprimes, par la spéculation à outrance et par les absurdes régimes de rigueur budgétaire imposés un peu partout en Europe, les banques centrales semblent avoir provoqué un processus de combustion qui échappe à présent à leur contrôle. Elles subissent – et nous avec – le principe de l’arroseur arrosé car leurs interventions semblent bien avoir pour effet de fragiliser davantage ce même système qu’elles espéraient sauver.
Qu’elles en soient directement responsables importe peu, car le fait est glaçant : les marchés boursiers brassent aujourd’hui plus d’argent que nos économies elles-mêmes, et sont en conséquence susceptibles de nous faire plonger dans l’abîme car – c’est bien connu – l’implosion des bulles exerce des ravages rarement prévisibles et encore moins contrôlables. Je l’écris et le dis depuis des années que nous sommes devenus tous japonais, mais le deviendrons-nous jusqu’à l’absurde ? Celui-ci étant que nos banques centrales, et notamment la Banque Centrale Européenne, se mettent à acheter des actifs à risque, dont les actions cotées en bourse, afin de tenter de sauver les meubles dans une sorte de tentative désespérée ? Pour ce faire, elles seraient condamnées à quintupler leur création monétaire, qui se monte déjà à 20 Trillions de dollars, rivalisant ainsi avec la Banque du Japon devenue pour sa part quasi-propriétaire de l’ensemble de son marché obligataire. Sommes-nous donc tous menacés de japanification, ou plutôt de « soviétisation », car une telle décision de la part de nos banques centrales occidentales reviendrait à une nationalisation – voire à une expropriation – de facto du marché des capitaux, évidemment sans précédent historique ?
Elles ne sont en rien responsables de nos déboires, et pas plus aux sources de notre marasme. Ceci dit, dans un contexte invraisemblables où l’Italie (oui, l’Italie) se finance mois cher que les USA, alors que les taux hypothécaires au Danemark sont négatifs – c’est-à-dire que votre banque vous paie quand vous lui empruntez de l’argent pour acheter votre maison-, l’impuissance de nos banques centrales fait peur ! Leur boussole s’affole et ne sait plus indiquer le Nord.
Allemagne, taux négatif sur toutes les échéances. Voilà de quoi encourager la lead manager des technocrates de Bruxelles à prendre quelques leçons de macro économie. Quand la courroie de transmission de la relance monétaire vire sur le braquet des marchés financiers faute à trouver sa juste place via les politiques de la relance budgétaire, faut-il encore s’étonner de cet autisme généralisé? Les dogmes ont la tête dure!
https://www.bloomberg.com/news/articles/2019-08-02/germany-s-whole-yield-curve-dives-below-0-for-the-first-time
Eh oui, ça sent la poudre ! L’économie US a continué de s’affaiblir alors qu’en juillet 2019 le chômage était à la hausse, avec un gain de masse salariale faible et quasi-consenti grossi par les révisions à la baisse de la période antérieure (Bureau of Labor Statistics, 2 août). Headline July 2019/U3, le chômage a enregistré une hausse à la deuxième décimale, passant de 3,66% en juin à 3,71%, poursuivant son ascension après avoir atteint son plus bas niveau en 49 ans (3,58% en avril 2019). Tout en allant à l’encontre du taux de chômage global historiquement bas, les niveaux de stress sur le marché du travail (rapport emploi-population et taux de participation) se sont maintenus à des niveaux déjà compatibles avec une récession en cours.
Reflétant une baisse du nombre de travailleurs faiblement attachés (y compris les travailleurs fortement découragés), le chômage est passé de 7,99% en mai à 7,23%. Pourtant, outre U6, l’estimation du chômage alternatif dans ShadowStats, qui inclut les travailleurs déplacés / découragés de longue durée non comptabilisés par le BLS, a également diminué, atteignant 21,0% en juillet, contre 21,2% en juin et 21,1% en mai.
Depuis que la finance de l’ombre a pris le pas sur l’économie dite réelle, qu’espérer? Les tricheurs sont devenus tellement plus puissants qu’ils gagnent la plus part du temps, et lorsque l’ardoise devient insupportable pour l’économie dite réelle, alors ça craque. Le pire serait toutefois l’effondrement d’une devise majeure. Est-ce pour cette fois?