Europe : en attendant la phase finale…

mai 5, 2010 0 Par Michel Santi

Les subsides de 110 milliards d’Euros offertes à la Grèce ne lui permettront probablement pas d’honorer ses engagements sur le long terme car le montant a été calculé sur des présomptions (ou des spéculations?) selon lesquelles ce pays sera en mesure de glaner des liquidités sur les marchés dès la fin 2011! Si les autorités Européennes estiment en effet avoir jugulé la crise de liquidités grecque, ils seront très prochainement pris de court par la crise financière qui va se répandre comme une tâche d’encre sur un papier buvard pour atteindre l’ensemble des nations d’Europe périphérique.

En fait, le Portugal et l’Espagne sont sur le point de basculer dans une zone de non retour, celle o๠les flux transfrontaliers de liquidités accuseront un déficit, celle en d’autres termes o๠les comptes vireront au rouge… Il est vrai qu’un pays (le Portugal) dont le déficit de la balance des paiements se monte à 10.3% du P.I.B. est terriblement sensible à tous flux sortants de capitaux. L’Allemagne, qui s’en tient hiératiquement et obstinément à la ligne selon laquelle ces pays devront rentrer en 2012 dans les limitations prévues par le Pacte de Stabilité, ne se rend-elle pas compte que, ce faisant, elle les étreint pour mieux les étouffer? La spirale dans laquelle elle les précipite est ainsi tout à la fois inéluctable que prévisible car les mesures d’austérité qu’elle les force à adopter – licenciements, contraction économique et déflation – mèneront à … une augmentation supplémentaire de leurs déficits!

Les seules et uniques mesures qui permettront à ces pays de renouer avec une croissance saine parce que durable étant celles qui favoriseront des gains en compétitivité sachant que l’introduction de l’Euro a eu, à ce titre, des effets dévastateurs sur un certain nombre de ces nations. Ainsi, la très faible croissance d’une nation comme le Portugal n’est-elle que la résultante d’une perte calamiteuse de la compétitivité d’un pays ayant perdu ses marchés à l’exportation (pays émergents et l’Europe de l’Est) friands de ses marchandises naguère vendues à bas prix. La progression des salaires nationaux ayant dà» compenser l’augmentation du coà»t de la vie subséquent aux réajustements Européens avec, pour conséquence, une lente érosion des gains de productivité…

Pour y remédier, l’alternative classique à laquelle ont recouru nombre de pays ces dernières décennies consistant en une politique monétaire expansionniste (taux d’intérêts très bas) combinée à une dépréciation massive d’une devise nationale dopant les exportations, serait bien-sà»r la solution idéale pour bien des nations dites du “PIIGS” aujourd’hui qui se retrouvent toutes dans un état de déficience de compétitivité quasi morbide… Autrement dit, au lieu d’encourager ces pays à se tirer d’affaire – non en les encourageant à sortir de l’Euro ou à étouffer leurs citoyens par une rigueur intenable – mais grâce à des gains en productivité via des investissements effectués à bon escient, l’Allemagne accélère l’avènement du stade final, à savoir une contamination déflationniste de l’ensemble de l’Union.

Les pays du PIIGS représentant plus du tiers du P.I.B. moyen de l’Europe, il serait en effet illusoire d’imaginer que des réductions substantielles de leurs dépenses et salaires resteraient sans impact sur leur demande agrégée avec, à la clé, une baisse massive subséquente de leurs importations réalisées pour le tiers au sein même de l’Union (avec un impact évident sur les exportations Allemandes). Dans un contexte Européen (dont le P.I.B. global dépasse 10 milliards d’Euros) o๠les économies nationales sont loin d’évoluer l’une par rapport à l’autre de manière harmonieuse (“convergente” diraient les Docteurs ès Europe), l’Euro agit à la manière d’un étalon or qui fige les cours des anciennes monnaies nationales ayant ainsi perdu toute faculté de dépréciation sans pour autant autoriser un quelconque mécanisme de remplacement permettant des transferts fiscaux salvateurs en période de forte crise. La BCE n’ayant par ailleurs nulle possibilité d’imprimer de la monnaie afin d’inonder de liquidités certains pays dans le besoin, les seuls restes dont peuvent bénéficier ceux des pays de l’Union en situation financière inextricable étant … le défaut de paiement!

On le verra très prochainement: ces 110 milliards d’Euros consentis à la Grèce n’ont pas réglé les questions essentielles.

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