L’or des allemands

L’or des allemands

novembre 1, 2012 0 Par Michel Santi

Saviez-vous que l’Allemagne ne conservait pas son stock d’or chez elle, auprès de sa banque centrale à Francfort ? Cette information cruciale était connue de très peu de monde…jusque là. Car des rumeurs étranges et des informations inhabituelles circulent tout récemment à propos des réserves allemandes en métal jaune. De fait, nous assistons depuis quelques petites semaines à la montée en puissance progressive d’une campagne visant à rapatrier ces stocks d’or qui se trouvent physiquement hors du pays, soit à New York, à Londres et à Paris. Cette absence d’Allemagne de ses réserves d’or est un phénomène d’autant plus étrange qu’elle jouit d’un stock monumental de 3’400 tonnes – le deuxième au monde! -,  détenant ainsi bien plus que l’Italie (2450 tonnes) et que la France (2435 tonnes). Un peu d’histoire : c’est en effet sous le système « Bretton Woods » que l’Allemagne – traditionnellement pays à forts excédents commerciaux – avait accumulé ces réserves, à une période où l’étalon or avait encore tout son sens. C’est également du fait des aléas de l’Histoire – cette fois avec un « H » – que la République Fédérale d’Allemagne avait stocké ces réserves hors du pays, par crainte d’une invasion Soviétique… C’est ainsi que la Réserve fédérale US détient aujourd’hui 66% des réserves d’or allemandes alors que la Banque d’Angleterre en conserve 21% et la Banque de France 8%.

De fait, c’est quasiment l’hystérie collective qui règne aujourd’hui parmi les allemands de toutes classes confondues – du simple citoyen au responsable politique – qui exigent le rapatriement de ces immenses réserves du métal précieux. L’équivalent de la Cour des comptes allemande elle-même a requis d’inspecter 150 tonnes de cet or afin de vérifier si sa teneur était conforme à ce qui figure aux comptes publics du pays. Y aurait-il comme de la suspicion dans l’air ? Les autorités allemandes accuseraient-elles les Etats-Unis ou l’Italie ou la France (ou toutes les trois) de diluer leur or ? Quoiqu’il en soit, l’exigence de cet audit par la Cour des comptes allemande démontre l’intensité de cette psychose saisissant actuellement l’ensemble de la population allemande, ayant même nécessité la publication d’une déclaration solennelle par la vénérable Bundesbank qui a affirmé que ses réserves d’or localisées à l’étranger étaient en sécurité !

Toujours est-il que cette rébellion allemande est riche de sens. En effet, elle achève tout d’abord de nous démontrer que l’état d’esprit allemand ayant prévalu depuis 1945 et qui soudait le sort de sa nation à l’Occident – en tout cas à l’Europe -, que cet état d’esprit a vécu. Pour laisser aujourd’hui la place à l’Allemand farouche défenseur de ses intérêts nationaux, ce qui est certes un réflexe naturel, mais qui en dit long sur le chemin parcouru par les mentalités allemandes, notamment depuis la crise européenne. Pour autant, cette volonté de rapatrier ce trésor à l’intérieur des frontières du pays indique également une perte totale de confiance des allemands envers l’euro. Leur souci étant effectivement de disposer de ces stocks en cas d’implosion de la monnaie unique, afin d’équilibrer et de conforter le retour éventuel du deutschemark. Il va de soi que, dans de telles conditions extrêmes, la présence de cet or dans les coffres de la Bundesbank et sous son contrôle, serait nettement plus rassurante… Autrement dit, cette campagne allemande visant à ramener leurs réserves d’or dans le giron national est également un acte de défiance incontestable vis-à-vis de l’euro, et en faveur d’un actif – l’or – inspirant aux allemands bien plus confiance que la monnaie unique. En réalité, l’allemand de base attend avec impatience cette sortie de l’euro.