Le calice jusqu’à la lie pour la Banque Nationale Suisse !

Le calice jusqu’à la lie pour la Banque Nationale Suisse !

février 1, 2012 0 Par Michel Santi

La guerre menée par la Banque Nationale Suisse contre les marchés et contre le franc fort n’est non seulement pas gagnée, elle est même loin d’être terminée car sur le point de reprendre. En fait, l’amélioration du climat de confiance auprès des investisseurs induit un changement subtil dans leur appréciation des valeurs refuges, ce qui tend à terriblement compliquer la tâche des banquiers centraux helvétiques.

 

La B.N.S. avait pourtant (enfin) remporté une victoire digne de ce nom en déployant toute sa force de frappe lorsque le cours de l’Euro / Franc Suisse avait dangereusement flirté avec la parité en cette première quinzaine d’Août 2011. Cet ultime test de crédibilité de la part d’une banque centrale qui avait – on s’en souvient – accumulé les revers et les pertes en 2010 et en 2011 dans le cadre de sa lutte contre les spéculateurs et les investisseurs avides de francs suisses fut en effet finalement concluant en cet été 2011. Le timing d’interventions brillamment conduites par l’ex trader Hildebrand – qui plus est dans un contexte de marché chaotique – devait ainsi prendre à revers la multitude de positions à la hausse en franc suisse tout en affirmant une volonté indéfectible de la part de la B.N.S. de défendre le plancher des 1.20. La spirale déflationniste menaçant sérieusement une économie fortement pénalisée par l’extrême fermeté de sa monnaie parce que nettement redevable à ses exportations justifiait amplement cette agressivité de la banque centrale. Sans réussir à inverser la tendance, elle avait toutefois clairement montré sa détermination à trancher dans le vif de spéculateurs qui avaient alors perdu beaucoup d’argent suite à ces interventions inopinées.

 

Le contexte n’est hélas plus le même aujourd’hui ! Le départ mouvementé de Philippe Hildebrand de la Présidence de la B.N.S. décrédibilise l’établissement et donc fragilise cette politique interventionniste dont il avait été le plus fervent porte drapeau. Les déclarations officielles de l’établissement insistent certes toujours sur sa nette détermination à défendre ce « floor » de 1.20 vis-à-vis de l’Euro mais il semble acquis que les marchés testeront très prochainement Thomas Jordan, successeur annoncé de Hildebrand. Confrontation imminente du reste car les cours s’approchent d’ores et déjà insidieusement de ce palier que la B.N.S.aura – à tort ou à raison– sacralisé. En outre, les critiques fort malvenues ainsi que les voix maladroites émanant de l’intérieur même du pays et  appelant à restreindre l’indépendance de la banque centrale achèvent de semer le trouble parmi les observateurs et les investisseurs internationaux. Un test, voire une cassure, des 1.20 semble donc inévitable.

 

Pourtant, c’est – théoriquement et logiquement – à l’affaiblissement du Franc Suisse qu’une telle perte de confiance en la B.N.S. devrait aboutir et non en cette appréciation annoncée. Car c’est bien un phénomène inhabituel qui est sur le point de se dérouler sous nos yeux : un Franc Suisse plus fort à cause de menaces qui pèsent sur la crédibilité de sa banque centrale ! Fluctuation irrationnelle en réalité sous tendue par les injections massives de liquidités prodiguées par la B.C.E. afin de secourir le système bancaire européen, liquidités dont une portion se loge néanmoins dans des devises refuges, comme le Franc Suisse et le Yen Japonais… La B.N.S. se retrouve donc face à une quadrature du cercle imposant un raffermissement du Franc Suisse dans une conjoncture où le fameux appétit au risque, loin de subir une dégradation, va en s’améliorant. Du reste, la corrélation historiquement positive en l’Euro/Suisse et l’indice S&P 500 est aujourd’hui devenue négative !

 

Autrement dit, voilà que la B.N.S. se doit à présent d’affronter un nouvel adversaire, à savoir la B.C.E. qui contribue indirectement à saborder les efforts suisses à la faveur de ses baisses de taux quantitatives visant à calmer la tempête européenne… Cette même devise helvétique qui s’était substantiellement appréciée du fait des tourmentes financières globales se voit donc aujourd’hui contrainte de poursuivre sur cette lancée par la faute des flux massifs injectés par la B.C.E. dans la zone Euro.