La Chine vacille

La Chine vacille

janvier 26, 2012 0 Par Michel Santi

Voilà dix-huit ans que la Chine a fait le choix de lier son économie à celle des Etats-Unis. De fait, après avoir subi des taux d’inflation à deux chiffres – 30% en 1994 ! -, la fixation du cours du Yuan par rapport au Dollar a permis de stabiliser l’économie chinoise. Il est vrai que la parité choisie à l’époque reflétait incontestablement les fondamentaux chinois et le niveau de compétitivité de ce pays. Le taux d’inflation modéré mais positif aux USA entre 1995 et 2004 combiné à des tarifs chinois à l’exportation en forte réduction (grâce à une main d’œuvre à bas prix) a très nettement favorisé la compétitivité chinoise au détriment de l’américaine. En même temps, la dollarisation de la gigantesque économie chinoise a crée une zone de sous évaluation – la Chine – qui basculait progressivement vers l’inflation face à une zone où régnait la surévaluation – les Etats-Unis – vouée, elle, à la déflation.

 

L’appréciation de 18% entre 2005 et 2008 du Yuan par rapport au billet vert fut évidemment insuffisante car l’inflation chinoise devait en effet s’accélérer à des rythmes préoccupants pour atteindre 8% en 2008.  Laquelle inflation devait par la suite décroître à la faveur de la crise mondiale, crise elle-même en grande partie causée par ces déséquilibres entre la Chine et les Etats-Unis… Toujours est-il que les stimuli chinois injectés massivement dans l’économie chinoise en 2009 et en 2010 additionnés au raidissement dès le milieu de l’année 2008 de la parité Dollar/Yuan furent couronnés de manière prévisible par une nouvelle fièvre inflationniste en Chine.  C’est ainsi que cette inflation devait connaître une accélération spectaculaire puisqu’elle a en effet augmenté de 5.5% en une seule année, de Juillet 2009 à Juillet 2010 ! Par ailleurs, l’envolée des prix énergétiques et alimentaires (de l’ordre de 20%) consécutifs aux baisses de taux quantitatives mises en place aux Etats-Unis, confrontés de leur côté au spectre déflationniste, devait constituer le coup de grâce pour une économie chinoise qui subit dès lors une escalade de son taux d’inflation qui dépassait les 7%  en 2011 ! En outre, les salaires en Chine augmentent de nos jours à une cadence – environ 10% par an – supérieure aux prix  tandis que les salaires américains, eux, stagnent depuis plusieurs années.

 

De fait, la politique systématique de sous évaluation des coûts activement recherchée par la Chine grâce au levier du contrôle strict de la parité du Yuan par rapport au Dollar est aujourd’hui incontestablement mise en échec. A cet égard, les Etats-Unis gagnent chaque année – voire chaque mois – davantage de compétitivité face à la Chine qui se rend compte que son inflexibilité sur le cours de sa monnaie n’était qu’un leurre ! Ce qui était effectivement récupéré sur ce terrain était sacrifié par ailleurs et de manière néfaste via la soupape inflationniste. Le modèle de croissance chinois entièrement tourné vers et redevable aux exportations se retrouve donc pour le moins menacé aujourd’hui et ce d’autant plus que les Etats-Unis (et avec eux bien-sûr l’Europe) seront naturellement forcés à réduire leurs importations dans le but de soulager leurs déficits massifs. Du reste, la croissance anémique mondiale escomptée cette année n’est qu’une composante des soucis à venir de la Chine qui serait également sinistrée – sur le plan inflationniste – en cas de reprise de l’activité mondiale. La zone de turbulences au sein de laquelle elle pénètre impose donc cette question : la Chine a-t-elle mangé son pain blanc ?

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