Au cœur du capitalisme : la corruption ?
Menacée d’être poursuivi par la justice britannique et américaine de manipulation du taux du Libor ou « London interbank offered rate », la banque Barclays vient donc de payer 453 millions de dollars à ces deux pays en règlement amiable de ce litige. Barclays était en effet accusée de rapports falsifiés (rédigés à son autorité de tutelle) ayant pour but de masquer ses propres frais de financements. La fraude présumée (effectuée dans le seul but d’améliorer ses profits) portait sur des hypothèques, prêts sur cartes de crédit et autres opérations consenties en faveur d’entreprises et de privés portant sur un montant approximatif de 500’000 milliards de dollars et ce à travers le monde entier. En dépit de démissions en masse et au plus haut niveau chez Barclays, le scandale ne s’arrête pas là pour autant. La filière de manipulation de ce taux d’intérêt vient seulement d’être mise à jour et elle devrait avoir infecté une quarantaine de sociétés financières et d’entreprises plus traditionnelles comme des dizaines de traders, toutes et tous impliqués à des niveaux plus ou moins graves dans cette nouvelle escroquerie financière révélée en cet été 2012…
Au même moment, le géant pharmaceutique britannique GlaxoSmithKline plaidait coupable de crimes fédéraux vis-à-vis des autorités américaines et acceptait de payer des amendes de l’ordre de 1’000 milliards de dollars pour avoir mis en circulation deux médicaments non approuvés par l’autorité sanitaire US (la FDA) et sans avoir passé les tests de sécurité élémentaires requis par la loi de ce pays pour un troisième médicament. GlaxoSmithKline fut également contrainte de payer 2’000 milliards supplémentaires afin d’étouffer une plainte civile groupée qui l’accusait d’avoir circonvenu des médecins et d’avoir établi de faux certificats, le tout dans le but de propager la diffusion de ces remèdes en question. Selon le Département de la justice aux Etats-Unis, ce montant total de 3’000 milliards de dollars constitue l’indemnisation pour fraude la plus importante de toute l’histoire de l’industrie pharmaceutique, loin devant les 2’300 milliards payés par Pfizer, les 1’400 milliards payés par Eli Lilly et le millier de milliards payés par Johnson & Johnson.
De la pression intense exercée sur leurs salariés (à tous les niveaux de la hiérarchie) pour atteindre et dépasser les objectifs au stress permanent où sont soumises les Directions Générales quant à l’évolution du cours en bourse de la société qui les emploie. Des retours sur investissements, des chiffres relatifs à leurs ventes nationales et internationales à leurs économies de fonctionnement. Les violations de la loi et la corruption semblent faire aujourd’hui partie des règles du jeu de ces entreprises et du monde de la finance, seulement préoccupés par réaliser de bons chiffres, dépasser les concurrents, conquérir de nouveaux marchés et clients…jusqu’à ce que certains se fassent malencontreusement « pincer ». Allègrement piétinées, l’éthique et la morale sont priées de s’éclipser face aux promotions, aux bonus et aux comptes et rapports falsifiés. Barclays et Glaxo ne constituent à cet égard que deux péripéties supplémentaires sur un long chemin de corruption et de scandales ayant touché (depuis une petite quinzaine d’années) Enron, Worldcom, News Corp ou Wal Mart… C’est donc l’ensemble du spectre du monde du travail (et pas seulement la finance) qui se retrouvent infectés par le conflit d’intérêt, par la comptabilité frauduleuse, par les fausses déclarations et par les atteintes à la vie privée.
Le capitalisme moderne est-il donc condamné à générer des monstres ? L’intervention de l’Etat est indispensable, non seulement pour sanctionner et pour réguler, mais également pour apaiser. Afin que le capitalisme retrouve ses lettres de noblesse, c’est-à-dire qu’il s’exerce dans l’intérêt général et pas seulement d’une infime minorité qui l’aurait capté pour son profit exclusif. Milton Friedman affirmait que le capitalisme est la liberté. Certes, à condition que l’Etat soit bien présent en tant que superviseur du capitalisme et garant des libertés. Car, comme l’écrivait James Madison , autre américain illustre et Père fondateur de la Constitution des Etats-Unis: “Si les hommes étaient des anges, le gouvernement ne serait pas nécessaire »…