L’ Espagne est-elle encore crédible?

février 5, 2010 0 Par Michel Santi

L’Espagne subira-t-elle le même sort que la Grèce? En tout cas, le Gouvernement Espagnol – qui semble subitement prendre au sérieux la capacité de nuisance de marchés financiers ayant décimé la Grèce – a annoncé coup sur coup l’allongement de deux années supplémentaires (jusqu’à 67 ans) de la durée du travail et l’augmentation des impôts.

Effets d’annonce dont l’objectif serait de rassurer les marchés ou réelle intention de mettre en place un plan d’austérité? Toujours est-il que la conjoncture actuelle de très forte récession en Espagne doublée d’une hyper fragilisation du secteur bancaire creuse l’écart entre ses obligations d’Etat et les Bons du Trésor Allemands dont le différentiel flirte avec les 100 points de base, signe d’anticipations croissantes de la part des investisseurs d’un défaut de paiement de l’Espagne sur sa dette souveraine.

En fait, c’est un vrai sentiment de panique qui tenaille actuellement Gouvernement et responsables économiques de ce pays conscients que leur système bancaire, déjà à genoux du fait de l’effondrement en bonne et due forme de leur marché immobilier, est sur investi en Bons du Trésor Espagnols aux valorisations en peau de chagrin. L’avenir de fleurons bancaires Espagnols, autrefois fierté et symboles de la réussite économique du pays, est aujourd’hui suspendu à la bonne volonté des marchés et à la détermination de leur Etat à enfin adopter un plan de rigueur digne de ce nom. Les autorités Espagnoles cèderont-elles aux sirènes électoralistes dont l’effet est de retarder indéfiniment ce type de mesures naturellement impopulaires ?

Toujours est-il que leur pays se retrouve bon dernier de la classe Européenne sur le plan des statistiques économiques. Ainsi est-il classé 26ème sur 26 concernant la Production Industrielle qui, au niveau Européen moyen, a connu en Décembre sa plus forte progression en deux ans tandis qu’elle avait encore régressé en Espagne. De même, ce pays compte la proportion la plus importante de demandeurs d’emplois (19.5% en Décembre dernier) dans un contexte Européen qui en comptait en moyenne 9.5% sur la même période avec des premiers de la classe loin devant (4% pour les Pays-Bas et 5.4% pour l’Autriche) alors que le Gouvernement Espagnol s’était engagé l’an dernier à ce que le niveau psychologique des 4 millions de chômeurs ne soit pas atteint… Il est aujourd’hui allègrement crevé sachant qu’Eurostat le situe même à 4.5 millions !

A moins d’une reprise économique mondiale fastueuse cette année, il y a fort à craindre que l’autre engagement Espagnol – celui de réduire ses déficits publics de 11.4 à 3% de son P.I.B. à l’horizon 2013 ne soit tout aussi illusoire. En réalité, l’Espagne manque considérablement de crédibilité et pour cause du reste puisque ce déficit annuel, annoncé à 5.2% du P.I.B. (ou 52 milliards d’Euros) en Septembre 2009 avant d’être révisé à 8.5% (à 85 milliards) deux mois plus tard vient d’être estimé à 11.4% (ou 110 milliards) tout récemment… Le Gouvernement semble donc avoir totalement perdu le contrôle de la situation car comment expliquer sinon qu’une projection de déficits publics puisse doubler en l’espace de moins de quatre mois et ce d’autant que ce chiffre risque d’être encore plus important du fait de déficits de certaines régions autonomes n’ayant pas été pris en compte ?

Et comment accorder le moindre crédit à un Gouvernement qui, suite à l’implosion d’un marché immobilier national hyper spéculatif ayant entraà®né le pays dans une récession aigue, vit encore à l’heure d’une prospérité économique bel et bien révolue? Les marchés se rappelleront donc très prochainement au bon souvenir de ce pays qui n’a toujours pas mis en place le moindre plan à même de stimuler croissance et emploi.

Monsieur Zapatero en était du reste bien conscient lorsqu’il déclarait il y a quelques jours à Davos: ” Nous sommes un pays sérieux et nous tiendrons nos promesses ” …

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