Jusqu’au bout de l’ivresse
Que les économistes et analystes qui prévoient une remontée prochaine des taux d’intérêts Américains tempèrent leur enthousiasme! Non, la Réserve Fédérale n’est pas prête à s’engager sur une telle voie qui calmerait certainement les ardeurs des spéculateurs boursiers et autres adeptes des actifs dits “à risques” ayant collectivement touché le jackpot ces mois deniers grâce à la politique monétaire exceptionnellement clémente de leurs banque centrale.
Les menaces inflationnistes – qui ne manqueront pas de se concrétiser! – importent peu après tout: La Fed et son Président Ben Bernanke y regarderont à cent fois avant de gâcher la fête si tant est qu’ils aient encore un simulacre de pouvoir et d’autorité sur des spéculateurs et investisseurs fêtards qui ont transformé les marchés boursiers en locomotive de l’économie Américaine. Bill Gross, le très écouté patron de Pimco, ne reconnaissait-il pas il y a quelques jours que les prix des actifs boursiers conditionnaient non seulement la ” psyché mais aussi le taux de croissance ” de l’économie de son pays tant et si bien que quand les Bourses ” ne montent pas, l’économie en souffre et quand elles baissent, l’économie devient horrible”?
Les aveux sont à peine masqués: Oui l’économie Américaine est plus dépendante que jamais de l’évolution boursière; Oui les actifs boursiers qui bénéficient de l’effet de levier ( donc de l’argent virtuel ) peuvent progresser alors même que l’économie réelle régresse par manque d’investissement; et enfin – logique conclusion – Oui notre vie quotidienne dépend du bon plaisir de la Finance qui tient la haute main sur l’ensemble de cette construction… En réalité, ceci est une fête privée et réservée à une élite ayant si bien manoeuvré que la progression des actifs boursiers a largement dépassé l’amélioration de la croissance économique ces trente dernières années. Et peu importe après tout si cette ivresse est de temps à autres dissipée par des failles sur un édifice d’endettement et de bulles qui risque de s’écrouler quand la Banque Centrale daigne s’intéresser à l’économie réelle et au taux d’inflation par des resserrements de politique monétaire.
La croissance économique avait déjà été sacrifiée à l’autel des capitalisations boursières grâce à la mèche des délocalisations ayant autorisé une nette amélioration des bénéfices des entreprises. La valeur travail s’était – au propre et au figuré – éclipsée au profit du capital: la richesse des Etats-Unis, mesurée par son P.I.B., devenait de moins en mois redevable au labeur et de plus en plus illuminée par les indices boursiers! Du reste, la Réserve Fédérale qui, en mère nourricière protectrice a pris sous son sein l’endettement privé et qui de ce fait a porté les dettes publiques US à 60% du P.I.B., peut-elle impunément jouer au trouble-fête?
C’est donc la gueule de bois inflationniste ou le coup de grâce de la banqueroute qui seront au menu de l'”after” avec une nette préférence pour une inflation provoquée par la forte dépendance de l’économie US aux actifs boursiers… Pourtant, en dépit d’une base monétaire ayant doublé en deux ans et malgré la commercialisation d’un montant de 2’500 milliards de dollars en quelques mois de Bons du Trésor Américains ( soit 20% de tous les papiers valeurs US en circulation! ), comment expliquer l’absence de pressions inflationnistes dignes de ce nom aux Etats-Unis?
Probablement par un retour prochain de la récession.
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