A l’aube d’une nouvelle crise
La Suisse est la première nation Occidentale à subir la fièvre Japonaise, elle s’enfonce dans la déflation. L’Indice des Prix à la Consommation, déjà légèrement négatif, atteindra avant l’été – 1%, niveau fatidique responsable de la modification de l’attitude du consommateur qui se traduira par une baisse supplémentaire des prix, laquelle découragera encore plus une consommation anticipant des prix toujours plus bas…
Face à cette spirale infernale aux implications absolument catastrophiques pour l’économie et le niveau de vie du pays, la Banque Nationale Suisse – cette référence des Banques Centrales, cette gardienne du dogme de la politique monétaire – a de la peine à masquer sa fébrilité. Faisant fi d’une doctrine orthodoxe dont ils furent jadis les défenseurs les plus ardents et les représentants les plus respectés – avec la sacro-saint Bundesbank de Francfort -, la B.N.S. adopte des mesures d’urgence visant à affaiblir le Franc Suisse : la délivrance par les exportations. Manipulation hautement périlleuse puisque, ce faisant, la Suisse exportera non seulement ses marchandises mais également le virus insidieux de la déflation.
Pour autant, la tentation est grande et bien compréhensible auprès de certains pays frappés par la crise de relancer leurs économies sinistrées par un surplus de recettes à l’exportation du fait d’une monnaie nationale dévaluée…même si ce passager clandestin qu’est la déflation – ainsi exportée – risque fort de provoquer une nouvelle crise. La Suisse n’est donc pas la seule à faire pression sur sa Devise puisqu’elle ne fait que rejoindre un club composé entre autres de la Suède, de Singapour, de Taiwan, de la Corée et du Japon.
Pauvre Japon du reste dont l’économie – en pleine liquéfaction – implose à un rythme absolument stupéfiant et sans précédent depuis les années 30! Un seul chiffre : sa Production Industrielle s’est effondrée en Février dernier à un rythme annuel de 38%. En fait, deux ondes de chocs bien distinctes traversent le Japon dont les industries exportatrices paient chèrement le prix du ralentissement économique mondial et dont la Devise s’est substantiellement appréciée du fait de rapatriements de capitaux effrayés par la tourmente généralisée, ce pays étant le premier créditeur mondial. Cette envolée du Yen – ayant atteint en fin d’année 2008 des sommets non enregistrés depuis 14 ans contre le Dollar – qui étouffe littéralement l’économie, augmente le chômage et appauvrit considérablement la population arrange pourtant les affaires des Etats-Unis et de l’Europe qui peuvent – grâce à cette courroie de transmission – reporter sur le Japon une partie de leurs ralentissements respectifs! La Banque du Japon a néanmoins menacé d’intervenir massivement sur les marchés afin d’affaiblir sa Devise qui, de ce fait, a perdu du terrain contre les monnaies principales en 2009.
Face à ce glissement bienvenu pour le Japon de sa Devise, il serait illusoire de miser sur la passivité du grand voisin Chinois qui commence à émettre des protestations à l’encontre de ces dévaluations compétitives. Les récentes statistiques y indiquent une reprise mais la Chine, qui a néanmoins perdu 20 millions d’emplois durant cette crise avec un Indice des Prix à la Consommation en baisse de 1.6% en Février, jouera certainement la carte de la dévaluation du Yuan afin de faire tourner sa multitude d’usines ne parvenant plus qu’à grand peine à exporter leurs marchandises…
Ces pays exerçant une pression baissière sur leur monnaie bénéficiant tous d’un excédent de leur balance des paiements grâce à leurs exportations – 6.2% pour la Chine, 8.4% pour la Suisse, plus de 15% pour Singapour -, devraient toutefois et en théorie se résoudre à sacrifier une partie de leurs réserves par esprit de solidarité afin de ne pas achever une consommation mondiale sur son lit de mort. Il n’en reste pas moins que certains de ces pays – à l’image du Japon et de la Suisse – qui voient un resserrement de facto de leur politique monétaire du fait de l’appréciation de leur Devise considérée “valeur refuge” se retrouvent dès lors dans une situation extrêmement inconfortable dans un contexte o๠leurs taux officiels ne peuvent plus être réduits!
Cette situation extrêmement inconfortable pour les uns devenant inextricable pour d’autres comme la Suisse ne bénéficiant pas du joker des baisses quantitatives pour cause d’un marché des bons du Trésor Helvétiques squelettique. Bref, l’angoisse de l’hiératique Banque Nationale Suisse est bien compréhensible d’une part au vu d’un contexte o๠les établissements bancaires du pays – fervents usagers de l’effet de levier -disposent de créances vis-à -vis des pays émergeants équivalentes à la moitié du P.I.B. Suisse et d’autre part du fait d’un secret bancaire qui amorce une rapide descente aux enfers!
Après la crise des subprimes, après la crise du crédit, la crise monétaire semble se mettre en place dans une sorte de jeu planétaire o๠certaines nations se passeront le témoin – ou le virus – de la déflation. L’inaction de l’establishment Occidental face aux gigantesques bulles alimentées il y a quelques années par les excédents de liquidités Asiatiques nous vaudra probablement une nouvelle et violente rechute provoquée par des dévaluations en chaà®ne.
Ce sujet brà»lant a-t-il seulement été effleuré au G 20?
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