Blocage idéologique au sein de l’équipe Obama

mars 6, 2009 0 Par Michel Santi

Barack Obama, dont on attendait avec raison qu’il enterre enfin le libéralisme débridé des “Reaganomics” est manifestement et ironiquement à contre emploi car il a passé ses premières semaines à la Maison Blanche à tenter de dissuader de nationaliser les banques Américaines certains Républicains résignés à cette perspective inéluctable…La gravité de la crise du crédit ayant effectivement persuadé un certain nombre de faucons Républicains de la nécessité de placer ces établissements dans le giron étatique.

En fait, et même si ces Républicains éclairés ont bien compris l’argument de certains analystes selon lequel le système ne pourrait se remettre à fonctionner que s’il était amputé de ses poids morts, la nouvelle Administration Obama regarde pour le moment ailleurs tant il est vrai qu’elle souhaite donner une dernière chance au secteur privé. En réalité, le problème fondamental du Secrétaire d’Etat au Trésor et de l’équipe économique d’Obama – composée notamment des deux piliers que sont Paul Volcker et Lawrence Summers – provient tout d’abord d’un blocage idéologique. N’est-ce pas en effet ces mêmes Démocrates, actuellement en responsabilité, qui ont par le passé inlassablement cherché à convertir leur aile gauche des limites de l’action Gouvernementale?

Voilà pourtant ces mêmes Démocrates changer aujourd’hui de discours et mettre en évidence les limites… du secteur privé! Voilà ces Démocrates ayant exercé des responsabilités durant les années 80 et 90 et ayant mis leurs coreligionnaires en garde contre les nationalisations ” à la Mitterrand ” contraint aujourd’hui à se reconvertir aux vertus du secteur public. Leur réticence est d’autant plus compréhensible que l’écrasante majorité des Républicains ne manquera pas de fustiger ces nationalisations en les comparant aux actions de Chavez…

Pourtant, il y a nationalisation et nationalisation, la première catégorie appartenant au palmarès de dirigeants tels que Lénine, Chavez ou Mitterrand et émanant de la conviction contre nature selon laquelle l’Etat est capable de gérer les entreprises importantes du pays avec plus de succès et d’efficacité que le secteur privé. La seconde catégorie ne recourant que provisoirement aux nationalisations afin de surmonter une crise aigue en permettant de guérir un système moribond : la stratégie Suédoise des années 90.

Ainsi, de nos jours, les ambitions des défenseurs des nationalisations bancaires aux Etats-Unis ne sont en rien comparables aux objectifs idéologiques d’un Mitterrand par exemple car ils souhaitent limiter strictement l’implication du secteur public à la période d’assainissement et de nettoyage des entreprises contaminées. L’avantage de la nationalisation étant qu’elle couperait court et de suite aux comportements pour le moins frileux des banquiers permettant ainsi au nouvel actionnaire – l’Etat – de siphonner les actifs toxiques en rendant leur “virginité” à des établissements bancaires qui seraient alors remis sur le marché dotés, en prime, d’une Direction Générale renouvelée…Ces actifs toxiques, qui seraient ainsi regroupés au sein d’un seul et même établissement, étant eux aussi susceptibles de récupérer quelque valorisation après la crise.

Seule une nationalisation sortirait les banques du cycle infernal o๠elles se sont enfermées elles-même et qui les conduit à accumuler mesures regrettables et investissements hasardeux décidés sous la pression du prisme de leurs pertes abyssales…En fait, la nationalisation boulverse la donne du management des banques car le nouvel actionnaire contrôle dès lors l’usage qui est fait des deniers publics.

Toujours est-il que, dans l’immédiat, la nouvelle Administration temporise en cherchant une voie moyenne qui consisterait à prêter de l’argent aux banques qui, à leur tour, seraient supposées trouver des solutions pour se tirer d’affaire. Pour autant, cette stratégie que privilégie aujourd’hui l’équipe au pouvoir aux Etats-Unis est précisément la voie médiane qui fut en son temps adoptée par des autorités Japonaises qui plongèrent leur pays dans une “décennie perdue” ! L’argument des collaborateurs d’Obama étant que cette solution serait nettement moins coà»teuse pour le contribuable car, dès lors que le Gouvernement aura démarré la nationalisation de quelques établissements, les actionnaires paniqués se désisteraient aussitôt des actions qu’ils possèdent dans d’autres banques, contraignant ainsi le Gouvernement à secourir immédiatement ces établissements dont la valeur serait amenée à péricliter irrémédiablement…

Ces hésitations de cette nouvelle et velléitaire administration Américaine ne font pourtant que retarder l’inéluctable car la nationalisation en masse des banques US est la seule et unique voie de sortie de cette crise. Espérons seulement qu’il ne sera pas trop tard lorsque le Gouvernement Américain en aura pris conscience.

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