Implosion à venir du système bancaire Européen ?

février 19, 2009 0 Par Michel Santi

Le drame qui se joue actuellement en Europe Centrale est susceptible de mettre à mal le système bancaire Européen déjà extrêmement fragilisé par ses pertes colossales sur subprimes et autres créances douteuses aux Etats-Unis mais également en Europe de l’Est.

Dans un ultime rebondissement quasi désespéré, les autorités Autrichiennes ont ainsi réuni tant bien que mal une enveloppe de 150 milliards d’Euros destinée à certains pays de l’Est Européen, le système bancaire Autrichien étant exposé à hauteur de 230 milliards envers cette région, montant équivalent à 70% du P.I.B. Autrichien! La récente fébrilité – voire la panique! – du Gouvernement Autrichien émane d’un rapport de la BERD ( Banque Européenne de Reconstruction et du Développement ) selon lequel ces débiteurs Est Européens feraient défaut à hauteur de 20% de leur endettement et ce dans un contexte o๠des cabinets d’audits mandatés par les autorités Autrichiennes ont estimé que le système bancaire Autrichien serait menacé d’effondrement avec un taux de défaut de 10%…Du reste, la presse Autrichienne s’attend à un “Stalingrad monétaire ” qui touchera notamment Bank Austria et sa consoeur Italienne Unicredito, toutes deux lourdement exposées en Europe de l’Est!

On comprend donc le dépit et la colère des autorités Autrichiennes qui, ayant sollicité une demande d’assistance Européenne à l’occasion d’un sommet à Bruxelles il y a quelques jours, ont essuyé un refus net et catégorique de la part d’un Gouvernement Allemand ayant expliqué en substance que ce problème ne le concernait en rien. Difficile en effet de comprendre cette intransigeance Allemande alors que l’Europe de l’Est doit rembourser cette année environ 320 des 1’350 milliards d’Euros que constitue sa dette, soit un tiers du P.I.B. de la région!

De fait, c’est l’ensemble de cette région qui se retrouve au bord de la liquéfaction, la Russie elle-même ne parvenant que péniblement à honorer ses engagements de 400 milliards d’Euros avec les prix pétroliers actuels et alors que son budget avait été établi avec un prix du baril à 95 dollars…Le Rouble s’étant du reste effondré de près de 40% depuis l’été dans une atmosphère de sauve-qui-peut généralisée. Au même moment, le Zloty Polonais, lui, a perdu 50% de sa valeur alors que 60% des hypothèques du pays sont libellées en Francs Suisses tandis que la Hongrie, l’Ukraine, les pays des Balkans et de la Baltique subissent quant à eux un sort similaire…La quasi totalité de la dette de ces pays de l’ex-bloc Soviétique étant due aux établissements financiers d’Europe de l’Ouest et tout particulièrement l’Autriche, la Suède, la Grèce, la Belgique et l’Italie.

Le système bancaire Européen, on le constate, a ses subprimes bien à lui si ce n’est que les Banques Européennes – exposées en Europe mais aussi aux Etats-Unis! – se retrouvent dans une posture nettement plus délicate que leurs consoeurs Américaines qui, elles, sont exposées seulement dans leur propre pays. De surcroà®t, selon le F.M.I., les Banques Européennes sont créancières à hauteur de 74% de la totalité des 4’900 milliards de dollars dus par l’ensemble des pays émergeants ! Toujours selon le F.M.I., outre que cette exposition des Banques Européennes vis-à -vis des nations émergeantes est cinq fois plus grande que celle des Banques Américaines et Japonaises, elle est également deux fois plus importante du fait de l’effet de levier utilisé! L’Espagne a elle aussi son marché subprimes, à savoir l’Amérique Latine qui s’installe progressivement à son tour dans la crise, le Brésil ayant ainsi créé 650’000 chômeurs de plus en un mois tandis que les ventes de voitures s’effondrent de plus de 50% en un mois au Mexique…

Le système bancaire Européen est véritablement au bord du gouffre dans un environnement o๠la Banque Centrale Européenne ne peut, à l’instar de la Réserve Fédérale US, se comporter comme le “prêteur en dernier ressort ” ( le fameux lender of last resort ) ou injecter force liquidités sur les marchés! De fait, la BCE, qui devrait d’ores et déjà avoir ses taux d’intérêts à 0% et se mettre à acquérir tout type de papiers-valeurs, est complètement coincée par le Traité de Maastricht et par un sempiternel veto de l’Allemagne secondée par les Pays-Bas! Pire encore : dans une conjoncture o๠l’Europe de l’Est a désespérément besoin d’honorer ses 400 milliards d’Euros d’engagements, certains Gouvernements Européens exhortent leurs banques à se retirer de cette région, la Grèce ayant ainsi exigé que ses banques se désengagent des Balkans…

De fait, les sommes en jeu dépassent de très loin les quelques 160 milliards d’Euros de réserves d’un F.M.I. qui, ayant déjà secouru la Hongrie, la Lettonie, la Biélorussie, l’Islande et prochainement la Turquie, fera probablement fonctionner sa propre planche à billets en émettant les fameux DTS ( Droits de Tirage Spéciaux ). Les fonds du F.M.I. n’ont en réalité été d’aucune utilité pour un pays comme l’Ukraine qui, en dépit des 16 milliards de dollars accordés, est sur le point de faire défaut avec un P.I.B. qui se contracte de 12% et avec les conséquences que l’on imagine sur Unicredito, Raiffeisen et ING qui y sont embourbés. Quant à la Lettonie qui, de l’aveu du Gouverneur de sa Banque Centrale en personne s’est déclarée “cliniquement morte “, elle subit une contraction de près de 11% de son P.I.B. dans une atmosphère de sédition o๠des manifestants ont pris d’assaut Parlement et Trésorerie!

En fait, il suffirait qu’un seul de ces pays cités ci-dessus soit abandonné à son sort pour activer un effet domino ravageur pour l’ensemble des nations de l’Ouest de l’Europe déjà extrêmement fragilisées, le P.I.B. Allemand s’étant ainsi contracté de 8.4% en données annualisées sur le seul quatrième Trimestre 2008…Assurément, Berlin n’aidera pas l’Irlande pas plus d’ailleurs que la Grèce, le Portugal ou l’Espagne qui menacent de faire défaut du fait de l’éclatement de leurs bulles respectives. Berlin ne secourera pas non plus l’Italie dont la dette publique dépasse 100% de son P.I.B. ni l’Autriche qui agonise en Europe Centrale…

La conjoncture actuelle en Europe, pire encore que la crise Asiatique des années 90, risque d’autant plus de dégénérer – y compris socialement – que les institutions Européennes ne sont pas armées pour lutter contre des périls de cette nature. La crise systémique qui semble sur le point de s’abattre sur l’Europe sonnera-t-elle le glas de l’Union?

Chers lecteurs,

Voilà plus de 15 ans que je tiens ce blog avec assiduité et passion.
Vous avez apprécié au fil des années mes analyses et mes prises de position souvent avant-gardistes, parfois provocatrices, toujours sincères.
Nous formons une communauté qui a souvent eu raison trop tôt, qui peut néanmoins se targuer d'avoir souvent eu raison tout court.
Comme vous le savez, ce travail a - et continuera - de rester bénévole, accessible à toutes et à tous.
Pour celles et ceux qui souhaiteraient me faire un don, ponctuel ou récurrent, je mets néanmoins à disposition cette plateforme de paiement.
J'apprécierais énormément vos contributions pécuniaires et je tiens à remercier d'ores et déjà et de tout cœur toutes celles et tous ceux qui se décideront à franchir le pas de me faire une donation que j'aime à qualifier d'«intellectuelle».

Bien sincèrement,

Michel