Evolution perceptible sur le marché des Changes
Dans le contexte actuel de taux mondiaux à ou proches d’atteindre le zéro, les fluctuations des monnaies semblent nettement favoriser les pays à excédents commerciaux, comme le Japon, la Suisse ou la Norvège. En effet, la crise économique et financière globale a divisé par deux les profits générés par les “carry trades”, c’est-à -dire ces investissements privilégiant les devises à haut rendement par l’intermédiaire de prêts libellés en devises prélevant un taux d’intérêt réduit.
En grande vogue pendant plus de six ans, le carry trade a effectivement souffert d’une réduction globale des taux d’intérêts de Banques Centrales soucieuses de faciliter l’accès au crédit, les détenteurs de carry trades ayant donc initié en 2008 la liquidation progressive de ces transactions. En fait, le mouvement s’est inversé, les nations bénéficiant d’un excédent commercial les autorisant à ne pas descendre dans l’arène du marché des capitaux – dans un environnement o๠le marché global de la dette souveraine devrait dépasser 3’000 milliards de dollars – sont à présent perçue par les spéculateurs et investisseurs comme une destination de choix! Effectivement, les fondamentaux d’une économie et d’un pays étant des facteurs déterminants pour les investisseurs en période de crise et d’incertitudes, le déficit ou l’excédent des comptes publics devient dès lors un indicateur crucial dans la valorisation d’une monnaie.
C’est donc en fonction de la variable “marché des capitaux ” que sont jaugées les monnaies, particulièrement vulnérables étant donc les pays souffrant d’un déficit budgétaire et commercial. Selon les chiffres de l’OCDE, l’excédent budgétaire de la Suisse était de 8% de son P.I.B. l’an dernier, 3.8% pour le Japon et 16% pour la Norvège tandis que le déficit de l’Australie, lui, était de 5.1% de son P.I.B. et le déficit Néo Zélandais de 9.5%…Selon Goldman Sachs, l’opération ayant ainsi consisté en l’acquisition des devises des pays à plus important excédent commercial et en la vente des devises à plus fort déficit aurait produit un rendement de 4% ces 30 derniers jours alors que cette transaction aurait perdu 5.9% sur six mois à partir du mois de Septembre. Le carry trade actuellement le plus rentable parmi les devises du G 10 est le croisement du Yen – qui coà»te 0.10% – avec le dollar Néo Zélandais qui en rapporte 5 mais ce même trade bénéficiait d’un différentiel de 7.75% il y a encore une année!
Au demeurant, le carry trade n’a pas tant souffert de la chute libre des taux d’intérêts que de l’aversion à un risque et à une volatilité provoqués par la crise et ayant fait craindre aux investisseurs de perdre sur les fluctuations erratiques des monnaies ce qu’ils gagneraient avec le carry trade…De fait, selon un rapport de JP Morgan Chase, la volatilité des devises principales a doublé depuis fin 2007 pour atteindre 19% alors que la volatilité des devises émergeantes a triplé pendant la même période pour atteindre 24%, le dollar Australien ayant perdu 20% en 2008 pendant que le Yen et le Franc Suisse en gagnaient respectivement 23% et 6.1%…Cette accélération de la volatilité, ayant connu son apogée lors de la faillite de Lehman en Septembre dernier, n’est que le reflet de la fébrilité excessive des investisseurs dans une conjoncture o๠les banques totalisent quelques 1’000 milliards de dollars de pertes, investisseurs qui, en conséquence, privilégient naturellement un billet vert toujours perçu comme monnaie refuge en période de tension extrême.
Un panier de devises à taux d’intérêt attractif comme la Couronne Norvégienne, le Dollar Néo Zélandais et l’Euro aurait ainsi perdu 14% sur une basse annualisée contre le Yen sur les 30 derniers jours, transaction qui aurait même perdu 31% sur toute l’année 2008 alors qu’elle aurait rapporté 8.7% en 2007…La roue a donc bel et bien tourné en défaveur des monnaies à haut rendement très prisées de 2001 à 2007 même si le pari sur les monnaies des pays excédentaires reste risqué du fait de la chute drastique des volumes du commerce international! De plus, les Banques Centrales veillent au grain, reconnaissant publiquement surveiller de près les fluctuations sur le marché des Changes afin d’y intervenir le cas échéant. A ce titre, la très activiste Banque du Japon a admis hier encore se préparer à intervenir pour vendre sa devise si le dollar devait s’affaiblir en-dessous du niveau de 85.
Néanmoins, la conjoncture économique mondiale devant rester anémique en 2009 o๠la croissance mondiale devrait difficilement atteindre 0.8%, les devises des pays déficitaires – à l’exception des Etats-Unis – devraient rester sur leur tendance baissière. Honnis soient donc la Livre Sterling, le Dollar Australien mais également le Forint Hongrois ou le Zloty Polonais. Plus que jamais, la préoccupation fondamentale des investisseurs sera la préservation du capital au détriment de sa rentabilité.
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