Les leçons du passé

février 10, 2009 0 Par Michel Santi

C’est la question à mille milliards de Dollars que se posent Gouvernements, Banques Centrales et établissements financiers du monde dit “développé”: Comment a-t-on échoué à prévoir une telle crise et qu’aurait-on pu et dà» entreprendre afin de la prévenir?

Un certain nombre d’indices comme l’ascension ininterrompue des prix immobiliers – particulièrement aux Etats-Unis, en Grande Bretagne et en Espagne – était pourtant manifestes. Symptomatique à lui seul fut le cas de la Grande Bretagne qui bénéficia ainsi d’une appréciation de 20% de ses prix immobiliers en 2002 tandis que le taux annuel de l’inflation, lui, n’y était que de 4%! La Banque d’Angleterre et les autorités politiques, ignorant les demandes pressantes de quelques Cassandre visant à relever les taux d’intérêts afin de ralentir cette spéculation, tablèrent au contraire sur une appréciation graduelle et supplémentaire de ces prix immobiliers, encourageant au passage les fonds de pension et de retraites Britanniques à miser sur ce marché.

L’optimisme – ou l’euphorie ambiante permettait de prédire des corrections de marché certes indispensables mais en tout état de cause molles, les créanciers et les débiteurs disposant théoriquement suffisamment de temps et de réserves à même d’amortir ces ajustements qui se dérouleraient forcément en douceur…Nos autorités avaient-elles vu venir le tsunami qui emporterait sur son passage le marché global du crédit pourtant crucial au fonctionnement de nos économies développées? Certaines zones d’ombre – ou de doutes – persistaient bien ça et là au sein du système financier mais peu avaient identifié le danger comme étant la résultante d’effets de levier et d’un endettement excessifs : En fait, l’architecture était devenue si complexe que nul – pas même nos autorités de réglementation et nos Banques Centrales – ne parvenait plus à en cerner les contours!

La stratification était telle qu’un bon professionnel dans son domaine d’activité ne se rendait même plus compte de l’interaction et des conséquences de ses propres interventions et opérations sur le reste du système. Qui se souciait – et qui aurait eu la curiosité du reste – de s’amuser à relier comme dans un cahier de dessin pour enfants les divers marchés constituant l’ensemble de l’architecture afin d’en saisir une image globale? En effet, une confiance aveugle était placée dans les agences de notation pendant que les autorités, elles, posaient les mauvaises questions et que les investisseurs du monde entier oubliaient tous les jours un peu plus ce que le terme “risque” pouvait bien signifier…

Aujourd’hui, ces mêmes investisseurs ont tous oublié que des actifs physiques bien réels se cachent souvent derrière les titres subprimes et autres papiers valeurs dits toxiques adossés à des prêts immobiliers. Du reste, les banques n’essaient même plus de vendre ces titres faute d’acheteurs en dépit d’une grande majorité de débiteurs hypothécaires qui continue scrupuleusement à rembourser ses dettes. En fait, les établissements financiers paient le prix d’une crainte généralisée – souvent justifiée – selon laquelle elles tenteraient de se débarrasser d’actifs grevant lourdement leurs bilans! Le marché étant ainsi paralysé, les valorisations de ces actifs continuent de décliner, un certain nombre de banques ne devant leur survie qu’aux injections de liquidités gouvernementales…

Cette spirale infernale ne pourra en définitive être brisée que grâce à l’intervention de l’Etat – seul acheteur encore en lice – susceptible d’acquérir ces divers titres à une valeur légèrement supérieure au marché actuel. Le contribuable s’en sortira-t-il bénéficiaire sur le long terme d’une tel plan de sauvetage seul capable de ramener par ailleurs une certaine confiance sur les marchés ? La stabilisation du système financier ne sera obtenue qu’à ce prix, cette considération est de peu d’intérêt tant il est vrai que les équipes d’Obama sont à présent convaincues d’aborder le problème sous cet angle plutôt que d’envisager des nationalisations bancaires.

Effectivement, les Etats-Unis – dont le système bancaire est complexe, tentaculaire et sophistiqué – ne sont pas la Suède, des groupes comme Citi ou Bank of America n’étant pas seulement trop importants pour couler mais également trop importants pour se faire nationaliser…Aucune institution de cette envergure n’étant ainsi susceptible d’être absorbée sans que sa capitalisation ne s’effondre immédiatement!

Il est certes impératif de ramener confiance et sérénité sur les marchés mais il est tout aussi indispensable de tirer des enseignements de nos erreurs et négligences : Réformer, perfectionner nos réglementations sans pour autant entraver croissance et innovation sera le défi majeur de main. Un travail indispensable de transparence et de pédagogie doit donc commencer sans tarder afin que toute la chaà®ne des intervenants au marché – investisseurs, créanciers, emprunteurs – jaugent et mesurent adéquatement les risques qu’ils sont prêts à assumer.

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