L’Europe face à ses nouveaux périls

novembre 12, 2013 0 Par Michel Santi

Les ratios des dettes publiques des pays européens périphériques par rapport à leur P.I.B. respectif ne font que s’aggraver. En effet, alors que la déflation y comprime et y déprime le P.I.B. comme l’activité économique, les endettements restent identiques. La situation est en réalité pire car, de fait, les dettes augmentent à mesure du déclin de l’économie. Phénomène classique décrit par Fisher qui usait de l’expression fort significative : « Plus les débiteurs paient, et plus ils doivent »… Les ratios dettes/PIB s’envolent tandis que les capacités de remboursement fondent inexorablement. C’est ainsi qu’il atteint aujourd’hui 161% en Grèce, qui se situe à la troisième place la moins enviable mondialement après le Japon et le Zimbabwe. Lequel ratio dettes/PIB se situe dans une fourchette comprise entre 115 et 125 % en Irlande, en Italie et au Portugal.

En outre, cette problématique déflationniste européenne se retrouve comme sublimée par une escalade des taux d’intérêt, non du taux officiel défini par la BCE, mais du taux réel. En effet, alors que dans un contexte habituel et en présence d’un taux officiel (à titre d’exemple) de 1% et d’une inflation de 2%, le taux d’intérêt réel serait négatif de 1%. Ce taux réel grimpe dès lors à + 2% si la déflation y est de 1%, c’est-à-dire si l’indice des prix chute de 1%. Et la banque centrale se retrouve impuissante pour lutter contre cette calamité si elle se borne à faire usage du seul levier de la réduction de son taux directeur, qui ne peut aller comme on le sait au-dessous de zéro. L’effet de la déflation est tel que le taux d’intérêt réel ne fait effectivement que s’apprécier et que peser sur les fondamentaux de l’économie, même en présence d’un taux officiel de 0%. Sachant que l’on évoque, là, le cas d’économies d’ores et déjà atteintes par le mal récessionniste, comme celui de l’Italie dont le P.I.B. se contractera de 2% cette année.

En d’autres termes, la voie royale pour couler un pays consiste à remonter le coût de financement de sa dette dans un contexte économique trouble. Voilà pourquoi, en dépit des auto-congratulations et des opérations de communication menées par nombre de responsables politiques, pas plus la reprise française que la reprise européenne ne sont à prévoir. De fait, les fondamentaux économiques de l’Union sont au bord de l’implosion, avec un taux officiel d’inflation de 1.1% – au plus bas depuis bientôt quatre ans – et qui masque une réalité, voire des réalités, inavouables. En effet, tandis que le cas grec est comme d’habitude le plus dramatique puisque ce pays subit une déflation nette de 1%, l’Irlande s’en rapproche dangereusement avec une inflation tout juste nulle. Quant aux cas espagnol et portugais, leur indice officiel d’inflation se situant autour des 0.3 à 0.45% induit en erreur et est fallacieux puisqu’il tient compte d’une augmentation importante de leur TVA. Sans laquelle ces deux nations auraient en réalité affiché une inflation négative…

En conclusion, l’Europe se retrouve aujourd’hui en danger. Pas à cause d‘une prochaine crise bancaire ou financière. Pas à cause de l’interruption programmée des baisses de taux quantitatives américaines. Mais du fait de la baisse des prix qui conduit à l’appréciation mécanique de ses taux d’intérêt réels, dans un contexte général de reprise économique très fragile, voire inexistante.

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