L’époque des barbares

Comment ne pas se souvenir de la série britannique culte des années 60, Le Prisonnier, où une bulle terrifiante poursuivait frénétiquement le héros incarné par le charismatique Patrick Mc Goohan ?

Notre monde se retrouve dans une situation similaire car nous sommes désormais tous otages de bulles. De celle qui isole les gouvernants, à la bulle des bourses qui se retrouvent à battre des records historiques de hausse dans une fuite en avant morbide, en passant par la bulle immobilière, à celle des aberrantes inégalités qu’il ne serait plus aujourd’hui possible de résorber que par une guerre ou par une révolution…

Tout comme la bulle qui poursuivait inlassablement le héros de cette géniale série télévisée, une malédiction similaire infecte notre univers contemporain car, de fait, l’implosion d’une bulle déplace mécaniquement la fièvre sur un autre champ, non sans avoir exercé ses ravages sur les plus vulnérables, comme d’habitude.

Au final, nous avons progressivement perdu le contrôle car la vie d’un individu ne dépend guère plus (pour paraphraser Stiglitz) de son salaire ou de l’éducation donnée par ses parents dans un contexte où la et où le politique en ruine ne peuvent pratiquement plus rien car dépouillés de leurs leviers.

Le grand Minsky, disparu en 1996, théorisait que la stabilité est trompeuse, qu’elle est en réalité déstabilisante, qu’une hyper fragilité est très souvent tapie derrière les périodes d’accalmies et de prospérité. Il serait contraint de revoir en profondeur sa copie car les secousses de tous ordres – financières, inflationnistes, géopolitiques…- jalonnent notre vie depuis de longues années dans un monde qui ne daigne même plus vouloir masquer sa dangerosité et modérer sa capacité de nuisance. L’instabilité est désormais la règle, plus l’exception.

Le physicien Max Planck notait que la science n’avance qu’«un enterrement à la fois». Les hécatombes auxquelles nous sommes confrontés seront-elles sources de progrès ?