Iran: population meurtrie et gouvernants défaillants

En Iran, le coût de l’alimentation a flambé de plus de 100% en un an, illustré par le prix de la patate qui scandalise la population à travers tout le pays. Son kilo a en effet bondi en quelques jours la semaine dernière de 200’000 rials à 750’000, allant jusqu’à provoquer des dissensions publiques au sein même des différentes branches de l’exécutif iranien qui s’accusent mutuellement et en public. La presse s’en mêle, un journaliste ayant ironiquement demandé quel était “l’espoir que ce gouvernement mette en place de quelconques réformes s’il ne parvient même pas à contrôler le prix de la patate?” Suscitant le commentaire d’un économiste du pays reprenant la fameuse citation de Milton Friedman qui affirmait en substance qu”‘il suffit de mettre le gouvernement en charge du désert pour que celui-ci vienne à manquer de sable”…Les autorités iraniennes ne se targuent-elles pas d’exporter massivement des pommes de terre en Iraq, au Turkménistan, au Kazakhstan et dans certains pays du Golfe tandis que leur propre population subit une crise alimentaire sans précédent?
Cette gouvernance largement défaillante contamine l’ensemble du spectre de l’économie et de l’activité en Iran, y compris bien-sûr le secteur de l’énergie. L’immense ville de Téhéran a ainsi subi le 11 février dernier une panne totale d’électricité ayant duré plus de 4 heures, causant un quasi cataclysme et mettant hors service les feux de signalisation, les connections cellulaires, contraignant les autorités à fermer les écoles, les universités, les services gouvernementaux. Prompts à pointer du doigt les sanctions internationales afin de diluer leur piètre gouvernance, les autorités passent sous silence l’hyper politisation – propre à ce pays – de problématiques techniques et commerciales relativement élémentaires, dont la conséquence insuffle à leur processus décisionnels une inertie à la source de toutes les dysfonctions. Tandis que l’Iran se vante d’exporter de l’électricité vers ses pays voisins, elle est incapable – comme pour les pommes de terre – de règlementer son marché intérieur.
Là aussi, au lieu de coopérer afin de résoudre cette grave crise dans un contexte de grand froid qui sévit dans leur pays, les ministres respectifs du pétrole et de l’énergie se rejettent mutuellement et avec acrimonie la faute. Là aussi, la presse s’en mêle et reconnait que c’est “le public qui paie le prix de cette mauvaise gestion” et avertit que “le peuple peut accepter les pénuries mais ne supporte plus cette lamentable gouvernance”, quand en même temps les ultra conservateurs taxent d'”incompétente” l’administration du nouveau Président Pezeshkian, laquelle conjure les citoyens de baisser de 2 degrés la température de leur chauffage…
Alors que la monnaie nationale, le rial, atteint désormais son plus bas niveau historique, le pire est à venir pour les iraniens, qui ont appris avec grande appréhension les nouvelles mesures dites de “pressions maximales” mises en place le 4 février dernier par Donald Trump dont le but est de réduire à néant les exportations iraniennes de pétrole.
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– “Toute ressemblance avec des usages atypiques de pays occidentaux ne serait que purement fortuite et ne pourrait être que le fruit d’une pure coïncidence dans la sémantique” –
Après avoir pris connaissance de cette chronique, étonnamment, voici ce que mon esprit a capté, toutefois avec toute la hauteur nécessaire et proportion gardée afin de rester politiquement correct !
Une réaction modérée à l’heure des “choix publics” où certains pays occidentaux [et pouvoirs technocratiques] semblent glisser dangereusement vers une forme de régime “semi-démocratique” e-o “autoritaire” [par extension]. Mais alors, oui, comment oublier Nicolas de Condorcet – du siècle des “Lumières” – et son paradoxe ? En effet,”il est peu aisé de trouver un système de scrutin où les désirs des électeurs soient représentés correctement”. C’est ainsi qu’à partir des années 1950/60, des auteurs américains tels que Anthony Downs, James M. Buchanan et Gordon Tullock, ont contribué à ce champ de recherche en élargissent la problématique au fonctionnement de l’Etat. L’oeuvre de Buchanan et Tullock [“The Calculus of Consent” – 1962] constitue de fait l’ouvrage de référence pour l’analyse des choix publics. Ainsi, dans la représentation que l’on se fait de la démocratie en Occident, l’”Homo-politicus” poursuit dans la sphère politique la même logique qu’il applique dans la sphère du marchand (ai-je dis de “tapis”?) à savoir celle de la poursuite de son propre intérêt. De par sa fonction, sa priorité devrait pourtant être l’Intérêt général et on pourrait l’imaginer comme désintéressé et au service du Bien commun. Or, en réalité, l”Homo-politicus” recherche avant tout à maximiser son intérêt (et celui de ses accointances) puisqu’il oriente son comportement en fonction de calculs qui lui permettent de se faire élire en proposant précisément des mesures qui reflètent l’opinion [ou divers pouvoirs, respectivement des entités ayant force d’autorité] de ses électeurs sans pour autant une fois élu, non pas leur “offrir une garantie de résultat” mais à minima une “obligation toute relative de moyens pour y parvenir” [souvent sans succès].
Ce à quoi James M. Buchanan rappelait (à la “foule”) qu’”il est utopique d’espérer d’un Homme [ou une Femme] politique un véritable changement SI les structures (défaillantes) de l’architecture qui compose un pays ne sont pas profondément réformées”.