
La Suisse : exemple à suivre ?
Le bilan de la Banque Nationale Suisse (la banque centrale) est désormais plus important que le P.I.B. du pays! Ce qui, pour une économie développée et totalement intégrée comme en Suisse est lourd de conséquences à long terme.
Coupable: la création monétaire intensive visant à affaiblir (en vain) le Franc Suisse.
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Bien sincèrement,
Michel
Si la « stabilité financière » en Suisse relève d’un mythe savamment entretenu, tout comme l’est du reste le phénomène de la création monétaire via la «planche à billet », alors une piqûre de rappel s’impose pour saisir les risques induis par le Hedge Fund « BNS ».
Les taux de change ont été libéralisés en 1971, opérant une véritable transfiguration du système de taux de change fixe en taux de change flottant et il faudra attendre les années 1980 pour voir s’amorcer le mouvement de libéralisation des taux d’intérêt ; les États passant d’un mode de financement de leurs déficits par la planche à billet (l’émission de monnaie) à un financement sur les marchés financiers (par l’émission d’obligations). Dès lors, « sans l’intervention d’un prêteur en dernier ressort », le décor est planté, les taux d’intérêt en vigueur pour une économie sont déterminés par l’offre et la demande de titres obligataires. Comme le taux de change correspond au prix d’une devise et le taux d’intérêt est le prix qu’il en coûte pour emprunter, on peut dire que dans ce système (néo) libéralisé, le prix des actifs devient instable et est soumis à la spéculation des marchés financiers. Pour contrecarrer l’aléa des marchés, sans surprises, les institutions financières ont créé des produits financiers novateurs destinés à couvrir le risque lié à la variation de la valeur des actifs, ou encore en transformant des Dettes en (pseudo) Actifs par le truchement de la titrisation. Peut-on encore ignorer que l’économie de l’offre ne doit sa survie qu’avec l’aide du levier du Crédit ? La politique des réserves factionnaires n’a-t-elle pas joué un formidable effet d’aubaine pour la « Supply-side economics » ? Lorsque les banques commerciales offrent des crédits aux particuliers, aux entreprises et aux multinationales, la plus grande partie de la ligne de crédit est crée ex-nihilo, et seule une fraction de celle-ci est exigée comme sureté prudentielle (selon les termes des accords de Bâle) placée sous forme d’avoir en « monnaies de banque centrale » sur leur compte ouvert auprès de la Banque Centrale Nationale (BNS). Inutile de préciser que si l’emprunteur est défaillant, c’est bien la banque commerciale, elle-même, qui doit « stériliser » la monnaie qu’elle a créé « ex-nihilo » et cette destruction se fait au détriment de ses fonds propre qui sont, eux, de la monnaie de banque centrale qu’elle ne peut d’aucune maniere créer ex nihilo. A lire certains articles de la Constitution fédérale helvétique qui a prévalu à la création de la Banque Centrale Nationale (BNS), ne concèdent-t-ils pas – à la Banque Nationale Suisse – le pouvoir régalien de « battre monnaie » en menant une politique monétaire servant l’intérêt général ? S’il est vrai que l’argent fiduciaire est fourni par des institutions privées, les billets par la BNS, les pièces par Swissmint, il importe de savoir que cette monnaie n’est obtenable que par le remboursement d’un montant en monnaie scripturale. Ors, nous devons savoir que la monnaie fiduciaire ne représente que l’argent nécessaire aux petites transactions et qu’elle ne représente qu’une valeur infime de la masse monétaire totale.
C’est donc bien les banques privées qui créent et mettent en circulation l’ensemble de la masse monétaire. Avec tous les risques qui y sont assimilés. Ainsi, en s’appropriant le rôle principal de création monétaire, les banques commerciales se sont substituées à l’Etat dans son rôle régalien et sans aucune contrainte de responsabilité sociale. Même pire, en surfant sur la tendance du « Moral Hasard ». Comprenons bien que lorsqu’un crédit est accordé (c-à-d une promesse de remboursement futur basée sur un rapport de confiance), la banque commerciale augmente simplement son bilan du montant désiré. En d’autres termes, elle crée simplement une quantité d’argent supplémentaire qui n’est somme toute…qu’une écriture comptable : de l’argent scriptural. La banque commerciale enregistre les formalités de crédit (promesse de remboursement du capital) comme un nouvel actif et elle ajoute le montant correspondant sur le compte de sa relation commerciale, donc au passif de la banque commerciale. Et c’est pareil pour tout achat : elle n’a pas besoin d’avoir la somme correspondante avant, elle « crée » cette somme à partir du « néant ». L’argent créé est mis en circulation dans le système économique par le biais des dépenses de l’emprunteur qui consiste donc essentiellement en une dette. C’est pourquoi les dettes font les dépôts et non l’inverse.
Bon, à présent que l’entrée en matière est terminée, revenons donc à nos moutons et au Hedge Fund « BNS ». Avec ces plus de 500 milliards de francs d’« avoirs en compte de virement des banques commerciales » dans son bilan – comme principale source de financement de sa politique non conventionnelle – ce poste s’inscrit au passif du Hedge Fund « BNS » et représente donc des dettes vis-à-vis du secteur bancaire commercial (entre-autres envers les «Too big to fail »). Et comme chacun l’aura à présent compris, « le collatéral » est en quelque sorte l’épargne (les fonds) que les banques commerciales, les assurances, y compris la SUVA, les caisses de pension et l’AVS déposent auprès de la « BNS ». Mais une banque centrale peut-elle mettre en gage l’épargne de tout un pays pour financer sa politique monétaire (ou devrais-je plutôt dire sa « guerre des monnaies »)? Dans l’ouvrage « Le crépuscule de la Banque nationale suisse, la déroute financière annoncée d’une institution en faillite morale », de l’économiste Vincent Held : « on y découvre au fil de ces pages comment la BNS (Banque Centrale Nationale) a massivement mis à contribution le système bancaire suisse – ainsi que diverses institutions de prévoyance ! – pour financer sa très coûteuse politique d’affaiblissement du franc. S’appuyant sur la confiance traditionnelle du peuple suisse dans sa banque centrale, cette institution mal contrôlée n’aura pas hésité à s’empêtrer dans une alliance contre-nature avec la finance spéculative européenne. Elle aura ainsi elle-même créé les conditions d’un ébranlement économique majeur pour le pays dont elle était censée servir les intérêts. Ces errements inouïs ne sauraient toutefois être exclusivement imputés à la Banque nationale. Car la classe politique suisse, après avoir cautionné le bradage de la moitié de ses stocks d’or au tournant des années 2000, allait bientôt lui offrir la couverture légale nécessaire à la conduite d’une “politique non conventionnelle” explosive. Cet ouvrage bref et clair a le mérite d’aborder frontalement et sans détours un grand scandale de l’administration helvétique que les médias n’évoquent qu’avec des pincettes. Précis et choquant ».
https://www.payot.ch/Detail/le_crepuscule_de_la_banque_nationale_suisse-vincent_held-9782888922124