
Le business model de l’Etat Islamique
L’Etat Islamique (EI) serait-il sur le point de monter sa banque? De fait, mettant ses pas dans ceux des autres organisations terroristes, l’EI tente de se doter des attributs d’un véritable Etat afin d’envoyer un message à ses sympathisants situés hors de Syrie et d’Iraq selon lequel il est désormais en mesure de leur fournir du travail et d’assurer leur subsistance. L’EI diffuse en effet une propagande consistant à faire croire à ses futurs ressortissants que les villes sous son contrôle sont désormais gérées par d’anciens fonctionnaires iraquiens et syriens ayant été embauchés à cet effet. Il est vrai que des sources fiables font état de professionnels de la finance (issus des pays arabes et d’Afrique du Nord) ayant été enrôlés par l’EI afin de lui monter sa banque centrale, elle même censée imprimer un jour prochain sa monnaie nationale. Bref, l’EI est en quête de reconnaissance et tente d’asseoir sa légitimité sur un budget qui devrait atteindre 2 milliards de dollars cette année censé assurer les besoins vitaux de ses citoyens en matière d’éducation, de santé, d’aides sociales envers les plus démunis et de travaux de construction et d’infrastructures.
Si ce n’est que cet EI exerce d’une main de fer son contrôle sur la totalité de l’économie de la zone sous son influence, confisquant les propriétés, réquisitionnant les usines encore en marche, infiltrant l’ensemble du réseau du commerce et des affaires. Pour ce faire, il s’appuie sur ses “missi dominici” qui ne sont autres que des commerçants autrefois ruinés, déchus ou autrefois sous les verrous lesquels dictent désormais leur loi aux acteurs de l’économie locale. Ainsi, dans Deir al-Zor, Hasakeh ou Raqqa (devenue leur “capitale”), ces “traders” contrôlent désormais l’intégralité du grenier syrien, depuis les modes de transport à l’agriculture, et c’est eux -donc l’EI- qui définissent les prix des denrées à vendre sur les marchés. Pour autant, la population vivant dans ces régions ne supporte pas uniquement l’arbitraire de tarifs échappant totalement à toute logique économique ou financière, ils subissent en outre brimades, voire persécutions.
C’est tout d’abord les femmes qui, quand elles ne sont tout bonnement pas interdites de travail, doivent endurer des conditions de travail insupportables. De l’ophtalmologue forcée d’opérer un œil accoutrée d’une burqa, à la coiffeuse qui doit purement et simplement interrompre son activité considérée par l’EI comme propice à la débauche. C’est une proportion massive de ces populations vivant sous le joug de l’EI qui ont perdu aujourd’hui leur outil de travail et qui n’ont plus de quoi assurer leur subsistance, dans un contexte aggravé par des tarifs prohibitifs de l’eau, de l’électricité et par une très lourde taxation prélevée par l’EI. Si, de l’avis des observateurs, les marchés sont bien approvisionnés et les commerces correctement fournis, ces marchandises ne semblent destinées qu’aux adhérents et militants de l’EI, seuls à pouvoir se les payer.
A Deir al-Zor par exemple, le prix des produits de base aurait effectivement flambé de 1’000% en quelques mois, manipulé par l’EI dont la stratégie est de punir ceux qui ne se sont pas encore enrôlés. La taxation dissuasive, le chômage chronique et les tarifs prohibitifs des denrées étant organisés sciemment afin de forcer la main aux résidents de ces régions de rejoindre les rangs de l’EI. C’est simple: la population se nourrit à base de tomates, de concombre et de patates pendant que les militants de l’EI ont droit à de la viande et à du poulet. Persécution orchestrée dans le but évident de grossir les effectifs de l’EI, et qui fonctionne du reste puisque des citoyens syriens et iraquiens désespérés et affamés rejoignent de plus en plus ses rangs. Rien qu’à Palmyre, 1’200 jeunes hommes auraient ainsi rejoints cette organisation en l’espace de quelques semaines.
L’opulence et le confort montrés et vantés à travers les différentes vidéos de l’EI ne sont donc qu’un leurre, et ne sont prodigués qu’en faveur de celles et ceux qui se muent en terroristes. Pour les autres, c’est le cauchemar.
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