Sauvetages bancaires : pourquoi est-ce toujours le citoyen qui boit la tasse ?

janvier 2, 2013 0 Par Michel Santi

Voilà qu’en ce vendredi 21 décembre, à la veille de Noël, et alors que les attentions étaient à mille lieux des tribulations européennes, c’est un rapport particulièrement révélateur qui fut publié par la Commission européenne http://europa.eu/rapid/press-release_IP-12-1444_fr.htm. Son objet consistait en effet à recenser les aides publiques octroyées au secteur bancaire de l’Union entre octobre 2008 et décembre 2011 qui ont, selon ce rapport, atteignent le chiffre vertigineux de 1’616 milliards d’euros ! Voilà donc les résultats chiffrés des efforts consentis par les 27 pays membres – c’est-à-dire par nous citoyens européens – et, ce, sans même tenir compte de l’année 2012 en cours. Laquelle année 2012 aura en outre vu les banques espagnoles bénéficier d’une première tranche de 39 milliards d’euros, ou encore le système bancaire de la minuscule Chypre pomper pas moins de 10 milliards. Cette somme phénoménale de 1’616 milliards d’euros – soit 13% du P.I.B. de l’ensemble de l’Union ! – fut donc injectée à hauteur de 1’174 milliards dans les banques pour renflouer leurs liquidités, et à hauteur de 442 milliards pour soulager leur solvabilité et pour les délester de leurs créances toxiques.

 

Mais ne pointons pas du doigt les établissements financiers espagnols pour leurs responsabilités, ni même les banquiers grecs pour leur hypothétique légèreté. Car c’est les banques britanniques qui furent les premières – avec 19% des sommes totales – à puiser dans cette cagnotte. Les banques allemandes et irlandaises étant secondes ex-æquo, avec 16%… Pourquoi le citoyen européen qui subit une austérité impitoyable est-il obligé de renflouer des banques britanniques qui ne jurent que par la City ? Et comment justifier l’attitude inqualifiable du gouvernement irlandais ayant protégé et sauvegardé les intérêts des investisseurs au détriment de ses citoyens et de ses contribuables ? Décision tragique qui fit basculer toute la nation irlandaise jouissant jusque là d’excédents de l’ensemble de ses comptes publics. Car, contrairement au message que veut faire passer ce dernier rapport en date de la Commission européenne, et envers et contre les prétentions et déclarations tonitruantes des responsables de l’Union affirmant que le sauvetage des banques était vital : ces sommes ne furent pas tant injectées pour renflouer les banques que pour sauver la mise des actionnaires, des créanciers obligataires, des investisseurs, des spéculateurs…

 

Il est effectivement crucial d’opérer une distinction nette entre la garantie apportée aux épargnants sur leurs dépôts et la caution en faveur des transactions commerciales d’une part. Et le chèque en blanc offert d’autre part aux investisseurs, pertinemment conscients de leurs risques et peu enclins à partager leurs profits passés, présents et futurs. N’y a-t-il donc nulle limite – matérielle comme morale – à la socialisation des pertes ? Le contribuable européen doit-il se résigner à éternellement couvrir les pertes et à cautionner les placements et les paris des investisseurs et des spéculateurs ? Car l’histoire des sauvetages bancaires (telle que contée dans ce tout récent document de la Commission) se résume en réalité au renflouement de cette caste privilégiée. Alors que le sauvetage d’un seul établissement financier important est susceptible de faire chanceler une grande nation et d’hypothéquer l’avenir de ses citoyens, les banques ont plus que jamais besoin des pouvoirs publics et de leur banque centrale, seule entité à même d’imprimer des billets qui serviront à cette remise à flots. Que l’indispensable intégration européenne ne soit pas un paravent derrière lequel se cacheront ces banques afin de puiser subrepticement dans les fonds de l’Union.

 

Faisons en effet le vœu que cette union fiscale et budgétaire à venir ne soit pas qu’un artifice supplémentaire autorisant des transferts de richesses du contribuable vers l’investisseur.

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