Message urgent à l’Allemagne

avril 11, 2012 0 Par Michel Santi

Le Produit Intérieur Brut espagnol, de 1’050 milliards d’Euros en 2011, devrait régresser de l’ordre de 2 à 2.5% cette année dans un contexte où le chômage est de 24% et où ce chiffre dépasse les 50% chez les jeunes de moins de 24 ans. En fait, l’ensemble des statistiques espagnoles sont condamnées à s’aggraver cette année : un chômage à 30% est effectivement probable alors que les endettements des privés espagnols atteignent 75% du P.I.B. national et que le système bancaire a un besoin vital de près de 80 milliards en capitaux supplémentaires. Sachant que la dette publique devrait atteindre – à 800 milliards d’Euros – le niveau de 80% du P.I.B., soit en très nette progression par rapport à 2010 où elle n’était que de 61%. Avec un tel palmarès, les marchés ne se privent à l’évidence pas d’alourdir davantage la charge de la dette espagnole. Tout à fait emblématique à cet égard étant l’appel de fonds lancé la semaine passée par l’Espagne qui a tout juste pu récolter 2.6 milliards d’Euros à un taux record de 5.85%. Pourtant, le pire est encore à venir car ce pays – qui doit impérativement lever près de 190 milliards en moins d’une année ! – devra donc descendre en moyenne dans l’arène des marchés toutes les deux semaines afin de se procurer ces liquidités à même de lui permettre de rembourser ses échéances.

 

L’Espagne relèvera-t-elle cet immense défi ? Sa seule et unique chance consiste en un soutien indéfectible de la Banque Centrale Européenne qui sera néanmoins empêchée par l’Allemagne d’ouvrir le robinet des liquidités. Attendons-nous à un remake des erreurs monumentales commises avec la Grèce où l’Allemagne n’autorisa le déblocage des secours qu’en toute dernière extrémité. En d’autres termes, l’Allemagne compte et espère gagner du temps et ne donnera le feu vert à la BCE que dès lors que l’Espagne aura atteint le point de non retour. L’Espagne n’est cependant – et de très loin – pas la Grèce car il est strictement impossible de concocter en dernière minute un plan de sauvetage pour la grande Espagne ainsi que ce fut le cas pour la petite Grèce… Cette même Grèce ayant du reste occupé le devant de l’actualité depuis si longtemps que tout le monde – et en premier lieu les dirigeants européens – ont aujourd’hui complètement oublié pourquoi était-il crucial de la sauver ?

 

Ce n’est en effet pas ce pays qui représente moins de 2% de l’activité économique de l’Union qui constituait une menace à l’origine. Le sauvetage de la petite Grèce devait être un message clair envoyé aux marchés et aux spéculateurs selon lequel la solidarité européenne s’appliquerait également à l’ensemble des dettes souveraines des autres membres. Il était donc fondamental de secourir la Grèce afin de signifier sans aucune équivoque que cette garantie collective – et jusque là tacite – des autres nations de l’Union Européenne serait honorée en cas de tourmente de l’une d’entre elles. L’assistance portée à la Grèce devait donc se muer en un symbole fort censé faire réfléchir et hésiter les spéculateurs et la caste des profiteurs prompts à faire leur beurre de la vulnérabilité financière des pays en détresse. C’était pourtant exiger trop de perspicacité à nos dirigeants européens qui nous offrirent au contraire au fil des mois un spectacle pitoyable où la Grèce ne fut finalement sauvée qu’à la dernière seconde. Cette crise européenne fut ainsi gérée de bout en bout avec amateurisme car les souffrances et les ennuis grecs auraient pu être réglés définitivement dès le printemps 2010.

 

Dans cette Europe idéale – et responsable – nul ne s’inquièterait de nos jours du sort de certains grands pays dans la tourmente comme l’Espagne car l’assistance ordonnée et déterminée à la Grèce aurait dissipé tous les doutes quant à la volonté et à la solidarité du reste de l’Union. C’est pourtant l’Espagne qui est aujourd’hui menacée et qui s’apprête à pénétrer dans une spirale « à la grecque ». Peut-être que le scénario de sortie de l’Union d’un petit pays comme la Grèce était-il après tout le plus optimiste ? Il n’est en effet plus aberrant aujourd’hui d’envisager un départ en catastrophe d’un grand pays, comme l’Espagne… En d’autres termes, que l’Allemagne et avec elle nos dirigeants européens comprennent que s’ils souhaitent aider l’Espagne, ils doivent l’aider immédiatement.

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