Etats-Unis / Allemagne : aux antipodes

janvier 13, 2011 0 Par Michel Santi

De plus en plus de responsables politiques, économiques et appartenant à la société civile américains observent l’Allemagne et ses performances économiques avec envie tout en étant conscients que leur modèle en est bien éloigné… Ainsi, alors que la “sucess story” allemande prend pour assise un secteur industriel dynamique, la richesse (aujourd’hui en grande partie révolue) du système anglo-saxon a été édifiée sur l’expansion boulimique du secteur financier. L’industrie, qui constitue en effet le quart de l’activité économique de l’Allemagne (mais seulement 11% de l’économie US), lui a ainsi permis d’obtenir des résultats phénoménaux puisque ce pays est aujourd’hui – derrière la Chine – le second exportateur mondial alors même que, en comparaison, il n’est peuplé que de 82 millions d’habitants…

De fait, les PME sont le moteur de cette réussite allemande: appartenant le plus souvent à des familles qui y travaillent, ces entreprises disposent de salariés fidèles et hautement qualifiés du fait de la qualité du système scolaire national, en grande partie orienté sur l’apprentissage. En outre, la nature même de ces structures permet à leurs dirigeants d’être moins préoccupés par l’évolution de leur cours en bourse que par la croissance sur le long terme de leur production et de leur développement. Sérénité renforcée par la présence, obligatoire au sein des conseils d’administration des sociétés cotées en bourse, d’une moitié de représentants du personnel… Bref, le visage du capitalisme allemand semble sympathique et d’autant plus inspirer l’optimisme que l’Etat participe activement à ce climat de confiance en payant aux salariés souhaitant ou étant contraint de travailler à temps partiel le différentiel avec leur revenu perçu à temps complet. Cette politique de l’emploi, appelée “kurzarbeit”, a ainsi permis à l’Allemagne de sortir victorieuse de la crise et de renouer avec une croissance admirable de 3.6% en 2010, au mieux depuis la réunification. 

Redevable bien-sûr à ses exportations et à son secteur industriel de qualité, la croissance du P.I.B. allemand fut, l’an dernier, la plus importante de toute l’Union Européenne, Suède et Slovaquie exceptées et ce dans un contexte où le taux de chômage (à 7.5%) est au plus bas depuis près de vingt ans. En fait, alors que le nombre d’actifs est, avec 40’500’000 salariés, à son plus haut niveau historique en Allemagne, le taux de chômage, lui, devrait péniblement s’améliorer d’un peu d’un pour cent aux Etats-Unis… Par ailleurs, les exportations ne comptent que pour 11.2% dans le P.I.B. américain tandis qu’elles représentent près de 41% de l’activité économique globale allemande (source: Banque Mondiale). Ainsi, la machine à exporter allemande fait-elle même des ravages dans un pays comme la Chine où ses ventes sont en progression de près de 50% sur 2010, Chine (et Hong Kong) qui reçoivent 6% des exportations allemandes par rapport à un chiffre de 4% avant la crise financière! (Pour mémoire, l’Union Européenne achète à 42% allemand et les Etats-Unis 7.5%…) 

Bref, alors que l’investissement à long terme est une constante de l’appareil de production allemand (Volkswagen n’a-t-il pas affiché ses intentions de devenir le premier constructeur mondial en 2018?), un pays comme les Etats-Unis, lui, se caractérise par sa propension morbide à s’endetter et à imprimer à vide de la monnaie… Alors que la compétitivité industrielle allemande permet de verser des salaires nettement plus attractifs que les revenus US, les écoles américaines, elles, produisent – à échelle industrielle! – force avocats et financiers… sachant que la masse des travailleurs doit se résoudre à accepter des emplois mal rémunérés, sans protection sociale avec, comme seule perspective, des prêts pour entretenir l’illusion de faire encore partie d’une classe moyenne en voie de disparition.

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