Comment rétablir l’espoir européen ?
A Davos, dans le cadre du prestigieux Forum Economique Mondial, Madame Merkel a tenté de rassurer les patrons des plus importantes entreprises du globe comme l’élite de la finance … qui l’ont cru ! Une chancelière plus que jamais déterminée – et incontestablement majestueuse – nous a ainsi assuré que l’Euro serait sauvé. Il est vrai que l’ambiance, encore extrêmement pessimiste il y a six mois pour la monnaie unique et pour les perspectives de l’Union Européenne, s’est nettement améliorée et ce principalement grâce à l’attitude des dirigeants allemands qui ont affiché leur détermination et qui ont progressivement réussi à convaincre de leur volonté de sauver l’Europe. La politique des petits pas pragmatiques – initiée par Anglela Merkel qui en a fait sa marque de fabrique – a en effet autorisé et présidé à cet assainissement relatif du climat général. De l’introduction – accélérée à l’été prochain – du mécanisme européen de stabilité à l’initiative du nouveau patron de la BCE, Mario Draghi, d’inaugurer les baisses de taux quantitatives européennes sous la forme de prêts généreux consentis au système bancaire de l’Union. En passant par le Président du conseil italien Mario Monti – imposé par l’Allemagne – et qui a toute la confiance des marchés. Ou encore le rôle très actif dans l’Union du F.M.I. à même d’imposer des conditions qui passeraient bien plus difficilement si elles étaient dictées par un partenaire européen… Autant de signes concrets qui plaident en faveur du sauvetage de l’Euro mais qui ne sauraient répondre aux questions fondamentales.
Quelle est la stratégie pour la croissance car il est évident que la seule austérité ne constitue pas de recette pour relancer l’activité économique ? Le poids de la dette est effectivement condamné à s’aggraver en cas de contraction économique et de réductions supplémentaires mécaniques des recettes fiscales. L’Europe ne pourra rien entreprendre du haut de la croissance prévue à 0.5% pour 2012 par le F.M.I.. C’est donc la malédiction déflationniste qui guette sans volonté claire et en l’absence de mesures concrètes pour rétablir la croissance. Cette volonté politique de sauver l’Euro – qui doit impérativement se mettre aujourd’hui au service de la renaissance économique et sociale du continent – masque ainsi très difficilement un écheveau de divergences, voire de rancœurs, au sein de ses membres. C’est le mépris des allemands envers les grecs, la rébellion de ces mêmes grecs contre les diktats allemands, c’est la condescendance du Nord de l’Europe envers les nations du “Club Med”, c’est les allemands qui prennent en pitié les français désormais privés de leur AAA, c’est les britanniques enfermés dans un isolationnisme tout aussi superbe qu’insensé… C’est, en somme, une crise de confiance massive et généralisée qui secoue les partenaires européens qui ne parviennent à s’entendre que sous la menace de la violence des marchés. S’il a vraiment lieu, le sauvetage de l’Euro sera entièrement redevable au chantage et à la peur.
Contrairement aux étapes décisives de la construction européenne – introduction du marché unique, élargissements successifs ou lancement de la monnaie unique – qui se réalisaient sous l’impulsion d’espoirs souvent fous mais O combien rafraîchissants, c’est seule l’angoisse de conséquences désastreuses qui a conduit l’Allemagne et les autres pays riches de l’Union au service minimum en matière de solidarité. Les avancées n’ont effectivement pu être enregistrées que sous l’emprise de craintes selon lesquelles l’effondrement des dominos européens finirait par nuire aux nations exemplaires. Sans croissance ou si la croissance ne bénéficiait qu’à une infime minorité de pays européens, ce ressentiment et cette incompréhension iront en s’amplifiant et seront exploités par les armées de populistes et de partisans des extrêmes qui remettront tous les jours davantage en question l’avenir européen. Pour préserver nos acquis européens – faits de qualité de vie et de justice sociale – qui sont aussi notre fierté, il est donc vital de renouer avec un projet, avec une volonté, bref avec un optimisme politique. Comme un retour en arrière est absolument inenvisageable, travaillons donc au retour de cette cohésion européenne car le sauvetage de l’Euro ne saurait être notre but ultime ou notre unique ambition.
La politique a peut-être aujourd’hui sauvé l’Euro, elle devra également s’employer à ramener l’espoir.
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