Demain une nouvelle Bulle…
A l’occasion d’un entretien accordé à un journaliste la semaine dernière, le Secrétaire d’Etat US au Trésor Tim Geithner a admis que la bulle spéculative ayant implosé en 2007 avait été causée par la politique monétaire d’Alan Greenspan tout en essayant de dédouaner partiellement la Réserve Fédérale Américaine qui n’aurait été à l’époque qu’une des nombreuses Banques Centrales à travers le monde à maintenir pendant un temps assez long cette politique monétaire ultra expansionniste. Il est toutefois vraiment regrettable que l’intervieweur Charlie Rose n’ait pas eu la présence d’esprit de lui poser la question fatidique : En quoi la situation est-elle différente aujourd’hui? …en d’autres termes, pourquoi la politique monétaire sans précédent des taux zéro appliquée par Bernanke, successeur de Greenspan, n’aboutira-t-elle pas cette fois-ci à la formation d’une autre bulle?
Qui plus est, les taux d’intérêts mondiaux avaient été considérablement réduits après l’implosion de l’autre bulle des valeurs technologiques tout simplement en réponse à la politique extrêmement laxiste de la toute puissante Réserve Fédérale US. Ne bénéficiait-elle pas en effet la devise de réserve principale? La quasi totalité des pays émergents n’ont-ils pas leur propre monnaie liée de près ou de loin au dollar Américain? Les Etats-Unis, qui détiennent une hégémonie absolue, exportent ainsi leur politique monétaire à travers l’ensemble du Globe, un bloc comme l’Union Européenne ou un pays comme le Japon considérant avec une angoisse continue le niveau de sa propre Devise vis-à -vis du billet vert…
Comment ignorer le cas d’école représenté par la période 2002-2004 o๠les taux d’intérêts réels de la Fed étant négatifs en termes réels – en tout état de cause en-dessous de la croissance de la productivité US -, cette politique monétaire avait été servilement suivie par des Banques Centrales Occidentales majeures afin de faire profiter leurs pays respectifs de la manne des liquidités à prix réduits?
La Banque Centrale Américaine s’est lancée il y a plusieurs mois à corps perdu dans une bataille contre la déflation en usant – et en abusant – de cette politique consistant à inonder de liquidités les marchés et donc à obtenir de facto des taux réels négatifs, au moins sur le court terme! En vertu de quel changement de réflexe ou d’habitude d’investissement n’assisterions-nous pas aujourd’hui – ou dans un avenir proche – à un rush sur des placements risqués et autres actifs toxiques censés être plus rémunérateurs?
Pourquoi s’est-on déchaà®né contre les agences de notation alors même que les investisseurs et spéculateurs recherchaient précisément et étaient friands de ces valeurs qui leur offraient un rendement plus intéressant? Pourquoi les taux d’intérêts nuls ou ridiculement bas en vigueur aujourd’hui ne précipiteraient-ils pas tant l’investisseur privé que professionnel dans les bras de la même sirène? Quant aux gérants de patrimoine et autres Banquiers Privés, ne sont-ils pas quasiment forcés de replonger dans cet océan de placements à risques sous la pression d’une clientèle qui menace d’aller voir ailleurs?
La semaine dernière, le Financial Times ne dévoilait-il pas un regain d’appétit de l’investissement en faveur des papiers valeurs à haut rendement et à risques, signe – selon lui – que le gros de la récession était passé…? La théorie de l’efficience des marchés semble toujours reine et si les haussiers (les acheteurs, les bulls) dominent à nouveau aujourd’hui, eh bien c’est qu’ils doivent avoir raison! L’appréciation substantielle des marchés boursiers, loin d’être comme il se devrait la conséquence de la bonne santé de l’économie, en est – aux yeux d’une écrasante majorité – le signe le plus infaillible…les marchés ne pouvant se tromper!
Ayant repeint une carrosserie rouillée sans prendre la peine de la traiter, nos Banques Centrales sont engagées aujourd’hui dans une voie à haut risques et dont la résultante sera de créer des distorsions de valorisations sur l’ensemble des marchés et des actifs. Pourquoi ces forces à l’oeuvre sous Greenspan que Geithner qualifie dans son interview d’ “extrêmement puissantes” ne séviraient-elles pas encore aujourd’hui et demain sous Bernanke?
La vérité est que les autorités monétaires Américaines sont résignées à la formation d’une nouvelle et autre bulle spéculative demain du fait même de leur impuissance : comme un ogre, la pyramide de Ponzi réclame encore et toujours plus de liquidités et de crédits, faute de quoi c’est l’ensemble du système qui est appelé à s’effondrer.
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Michel