Javier Milei: dernière chance de l’Argentine

Javier Milei: dernière chance de l’Argentine

janvier 6, 2024 25 Par Michel Santi

Nombre de pays ont décidé de ne plus utiliser leur monnaie mais d’adopter le dollar américain comme standard d’échanges. Pour certaines économies mal gérées, rongées par la corruption, l’abandon de la monnaie nationale est souvent le dernier recours avant la liquéfaction. Nous, Occidentaux, ne nous rendons pas compte des infinies complications et du calvaire que fait subir une monnaie emportée par une spirale de dépréciation ininterrompue. Nous, Occidentaux, n’apprécions pas ce luxe procuré par une devise stable autorisant une fixation au long cours des tarifs des biens et des services.

Il suffit de se promener aujourd’hui à Buenos Aires dans les supermarchés ou dans des magasins d’électronique pour constater qu’aucun prix n’y est affiché, car celui-ci est susceptible de changer plusieurs fois par jour. Les souffrances infligées aux populations en terme d’incertitudes macroéconomiques, les insupportables pertes de temps à devoir compter pendant de longues minutes des liasses de billets de banque afin de régler ses emplettes, plaident ardemment pour l’adoption par certaines nations du dollar (ou pourquoi pas de l’euro ?) qui interrompra de manière définitive l’infection généralisée et irrémédiable.

C’est précisément ce qui fut entrepris autour des années 2000 en Equateur et au Salvador qui ont très nettement bénéficié de l’abandon de leurs monnaies respectives en faveur du billet vert. Autrefois parmi pays les plus pauvres d’Amérique Latine, ils se sont redressés de manière spectaculaire, passant d’un taux d’inflation de 15 % pour le Salvador et de 50% pour l’Equateur à environ 3% en à peine quelques années. L’adoption d’une monnaie-étalon exerce un effet dissuasif sur l’inflation car tous les produits et services deviennent dès lors exprimés en un médium d’échanges stable, rétablissant la sérénité des consommateurs qui n’ont plus à angoisser pour s’en dessaisir avant une nouvelle flambée des prix, et qui relancent des projets à long terme. L’exemple du Panama officiellement dollarisé est révélateur où un crédit à taux fixe et à 30 ans est courant, quand il n’est possible d’emprunter qu’à 1 ou 2 ans et à taux variable dans les pays subissant l’hyperinflation.

Après avoir rangé leur monnaie au rang des reliques, le taux de croissance du Salvador s’est révélé 30% au-dessus de la moyenne régionale, tandis que l’Equateur a permis à son économie de croître d’environ 7% par an. Vingt ans plus tard, leur taux de chômage est sous la barre des 4%, quand l’Argentine affiche un taux «officiel» de 12%. La disparition du risque de dévaluation dans les pays ayant opté pour le dollar autorise leurs importateurs et exportateurs à commercer en toute sécurité, à redonner vitalité à leur économie. La gestion calamiteuse de l’Etat y est beaucoup moins nocive car les entreprises et les privés peuvent poursuivre leurs affaires, et ce même en cas de défaut de paiement de leur pays. Dans ces conditions, pourquoi l’Argentine a-t-elle conservé jusque-là un Pesos qui fait subir à sa population une terrible inflation (près de 150% en 2023), si ce n’est pour la pérennisation par une infime élite de son propre pouvoir, accessoirement pour la consolidation par certains de leur corruption endémique qui a rongé le pays jusqu’à l’os.

C’est donc sur mandat clair qu’a été élu Javier Milei en Argentine, qui s’est engagé à la fois à abandonner le Pesos et à démanteler la banque centrale du pays, laquelle n’aura en pratique plus aucune latitude pour une quelconque politique monétaire qui lui échappera totalement, puisque celle-ci sera menée depuis Washington (par la Réserve Fédérale). Rayée des organigrammes, ou très largement dépossédée de ses pouvoirs, la banque centrale ne sera plus en mesure de créer de l’argent servant à renflouer les déficits et à acheter la dette publique, utilisé par l’exécutif pour régler les frais de fonctionnement du pays, tout en masquant sa propre incompétence. Accessoirement, le taux d’inflation argentin sera drastiquement revu en baisse puisqu’il s’alignera sur le taux d’inflation américain.

Il n’est pas nécessaire d’être libertaire ou anarcho-populiste comme l’est Milei pour comprendre les bienfaits substantiels de la dollarisation dans certains pays, comme l’Argentine ou encore le Liban, gage d’un retour à la prospérité, d’une réduction massive des risques financiers, d’un renforcement du système bancaire.

Chers lecteurs,

Voilà plus de 15 ans que je tiens ce blog avec assiduité et passion.
Vous avez apprécié au fil des années mes analyses et mes prises de position souvent avant-gardistes, parfois provocatrices, toujours sincères.
Nous formons une communauté qui a souvent eu raison trop tôt, qui peut néanmoins se targuer d'avoir souvent eu raison tout court.
Comme vous le savez, ce travail a - et continuera - de rester bénévole, accessible à toutes et à tous.
Pour celles et ceux qui souhaiteraient me faire un don, ponctuel ou récurrent, je mets néanmoins à disposition cette plateforme de paiement.
J'apprécierais énormément vos contributions pécuniaires et je tiens à remercier d'ores et déjà et de tout cœur toutes celles et tous ceux qui se décideront à franchir le pas de me faire une donation que j'aime à qualifier d'«intellectuelle».

Bien sincèrement,

Michel