Hep, monsieur Trump !

Hep, monsieur Trump !

mai 4, 2025 1 Par Michel Santi

Dans le monde d’hier, la domination du dollar revenait à un dilemme faustien : les États-Unis pouvaient certes se financer à bon marché, au prix cependant d’une dépendance envers l’étranger conduisant à son déclin.

Une définition traditionnelle d’une monnaie de réserve est que le pays auquel elle appartient doit être déficitaire au niveau de sa balance des paiements. Pourquoi ? Afin de fournir la liquidité au reste du monde. Des déficits massifs, et sur plusieurs années, entament néanmoins la confiance en cette même monnaie, qui se retrouve dès lors fragilisée et dont le statut de réserve sera progressivement remis en question.

En vertu de cette logique, les discours et les actes de l’administration US stigmatisent les nations bénéficiant d’excédents commerciaux, aboutissant à une surévaluation structurelle du dollar et à l’agonie du secteur industriel américain. Naturellement acheteuses de dollars, les banques centrales étrangères sont également sur le banc des accusés pour manipulation à la baisse de leur propre monnaie, et ainsi favoriser leurs excédents commerciaux nationaux. L’exécutif américain constate comment elles recyclent ainsi leurs dollars sur les Treasury Bonds, contribuant elles aussi et à leur tour à saper l’industrie US et à nuire aux travailleurs du pays.

Cette analyse des responsables américains, qui se posent en victimes de la duplicité des États et des banques centrales étrangers, n’est pourtant plus adaptée à l’architecture actuelle de la finance globalisée.

Les déficits sont également largement accentués par les flux de capitaux générés par un système financier privé, d’une élasticité légendaire. Les vrais déséquilibres d’aujourd’hui ne sont pas tant liés au commerce transfrontalier qu’aux flux proprement stratosphériques de liquidités qui s’investissent aux États-Unis dans les actifs financiers et tangibles, en provenance d’acteurs du secteur privé, de gestionnaires de fonds, du système bancaire de l’ombre (shadow banking) localisés dans des centres financiers comme le Luxembourg, l’Irlande, les îles Caïmans…

La finance globale ne recycle pas ses excédents et ses placements à travers des canaux traditionnels, mais grâce à la prolifération d’institutions financières de toutes tailles qui multiplient les effets de levier afin de maximiser à la fois leur impact et leurs profits. La toute-puissance du dollar n’est pas menacée par les déficits américains. Elle l’est en revanche, et de manière certaine, par l’illusion de sécurité offerte par une finance globale pourvoyeuse par beau temps de liquidités massives et opaques.

Il faut prendre conscience que le cœur du mécanisme assurant la liquidité au système a subi un bouleversement de paradigme. Ce ne sont plus tant les déficits US qui permettent de financer les États-Unis et le reste du monde, mais la création monétaire privée qui s’évapore dès qu’elle sent les risques poindre à l’horizon. Que ses conseillers expliquent au Président des États-Unis que nous ne sommes plus dans les années 1980-1990, même plus au début des années 2000, car la véritable vulnérabilité de la nation américaine se trouve nettement plus dans l’instabilité financière que dans les déficits commerciaux.

Dit autrement : les équilibres/déséquilibres comptables officiels permettent de discerner une partie de l’image, sans permettre d’apprécier la complexité et la concentration des risques financiers. Un pays entretenant des comptes équilibrés peut parfaitement être source d’instabilité globale. Un autre, comme les États-Unis, affichant des déficits gigantesques et persistants, peut néanmoins conserver son statut de refuge et de monnaie de réserve pour autant qu’il parvienne à éviter la tourmente financière.

…avant de partir, lisez un court extrait d’ “Une jeunesse levantine”

“On peut être témoin d’un crime, sans pour autant l’approuver. On peut serrer une main dont on sait, ou dont on sent, que son propriétaire est un pourri. On peut recevoir des paroles sans vraiment en saisir sur le moment la portée. Il y a 45 ans, ce que ce jeune homme a vu d’atroce ou d’immoral, ce qu’il a vécu de situations et d’évènements dramatiques, ce qu’il a rencontré de personnages parfois immondes ou manipulateurs, l’adulte que je suis tente de le restituer. Je n’étais encore qu’un enfant choyé par ses parents…”

 

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