La décrédibilisation de l’Etat : effet collatéral de la crise

septembre 21, 2011 0 Par Michel Santi

La classe dirigeante européenne, comme les partisans d’un Etat fort intervenant activement dans l’économie, traversent aujourd’hui une crise existentielle. Leurs objectifs d’une économie rassérénée et lissée par la politique (au sens noble du terme) supposée également nous offrir une société plus juste périclitent… faute d’argent ! Eh oui, le constat est global et indéniable : nos Etats et leurs dirigeants n’ont plus les moyens de tenir les engagements tenus à leurs citoyens.

 

Ne nous y trompons pas à cet égard car la crise européenne dépasse largement le strict cadre financier et économique : elle est aussi le symptôme d’une classe dirigeante en pleine tourmente.  Qui ne se rend que trop compte de l’emprise évanescente de son pouvoir sur les finances et sur l’économie des nations européennes, en fait tout bonnement sur la vie quotidienne de ses citoyens. En accord avec la population européenne qui n’en mesurait probablement pas l’ampleur, la pieuvre européenne avait tant et si bien étendu ses tentacules que les dépenses publiques avaient finis par représenter près de la moitié de l’activité économique au sein des dix-sept nations de  l’Union ! Inexorablement, le champ de l’action publique s’est néanmoins rétréci à la faveur de cette crise inédite, marquant du même coup une perte de pouvoir sans précédent des élites politiques dirigeantes.

 

Et pour cause : Des emprunts massifs contractés envers et contre le bons sens et l’intérêt publics aux ratios d’un laxisme inouï exigés de la part des banques en contrepartie de leurs engagements en terminant par le feu vert donné à la BCE d’acheter des milliards d’Euros de dette des pays périphériques au risque de se transformer elle-même en établissement « zombie », les politiques sont les seuls à blâmer aujourd’hui pour cette cacophonie et c’est à eux seuls qu’ils doivent s’en prendre pour leur perte de pouvoir et, accessoirement, pour les dérapages de la crise aigue qui fait trembler notre continent. Si l’Euro est aujourd’hui en danger, c’est le fait même de ces simulacres de remèdes imposés aux pays très fragilisés comme la Grèce et ayant condamné toute issue honorable.

 

Comment s’étonner de l’aggravation de la conjoncture grecque alors même que la mixture rigoriste lui ayant été prescrite a résulté en une contraction de 7% de son économie en 2010 (5% prévue cette année), d’un effondrement de 8.5% des recettes de l’Etat et d’une facture sociale en augmentation de près de 15% du fait de l’aggravation du chômage ? Cette cure d’austérité ayant ainsi abouti à l’effet inverse, c’est-à-dire à l’accroissement de l’endettement étatique, alors même que le P.I.B. national régresse en peau de chagrin. Pour autant, les ravages de ces décisions politiques inconséquentes ne s’arrêtent pas aux frontières grecques puisque le Portugal, l’Espagne et l’Italie se retrouvent aujourd’hui sur cette même pente savonneuse. Majoration à 21% de la T.V.A. italienne. Augmentation de 1% de l’imposition des privés et de 2.5% de l’impôt sur les sociétés au Portugal. Instauration d’un impôt sur la fortune en Espagne. Face aux tourmentes, les solutions préconisées par nos autorités se déclinent en une concentration accrue des pouvoirs des institutions européennes et en un plaidoyer pour une mainmise par la pieuvre sur les budgets nationaux.

 

Autrement dit, le réflexe – ou instinct de survie? – de l’élite en charge des affaires est de s’arroger encore plus de pouvoir dans un contexte de crise en partie causée par le monopole abusif et désordonné de l’Etat sur les économies. En réalité, ces tentatives désespérées ne parviennent même plus à masquer le fiasco de notre modèle politico-économique qui prétendait dogmatiquement garantir nos retraites, réguler le marché du travail pour préserver nos emplois tout en harmonisant la société par la grâce de ses allocations sociales. Nous nous apercevons aujourd’hui des limites du pouvoir de nos Etats et apprenons, en définitive, qu’il ne faut compter que sur nous-mêmes.

Chers lecteurs,

Voilà plus de 15 ans que je tiens ce blog avec assiduité et passion.
Vous avez apprécié au fil des années mes analyses et mes prises de position souvent avant-gardistes, parfois provocatrices, toujours sincères.
Nous formons une communauté qui a souvent eu raison trop tôt, qui peut néanmoins se targuer d'avoir souvent eu raison tout court.
Comme vous le savez, ce travail a - et continuera - de rester bénévole, accessible à toutes et à tous.
Pour celles et ceux qui souhaiteraient me faire un don, ponctuel ou récurrent, je mets néanmoins à disposition cette plateforme de paiement.
J'apprécierais énormément vos contributions pécuniaires et je tiens à remercier d'ores et déjà et de tout cœur toutes celles et tous ceux qui se décideront à franchir le pas de me faire une donation que j'aime à qualifier d'«intellectuelle».

Bien sincèrement,

Michel