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Interview E24.fr

M.Santi: “Les souscrripteurs de la dette seront prudents”
mercredi 20 janvier 2010 | Publié 10:21 | Actualisé 15:22

Michel Santi, économiste et analyste indépendant (www.gestionsuisse.com), considère qu’une bulle s’est bien formée sur le marché de la dette mais qu’elle devrait se dégonfler tranquillement dès cette année.

E24: Y- a- t-il une bulle obligataire?

Oui, incontestablement. Les Etats sont l’origine de celle-ci en ayant émis tout azimut de la dette. Les plans de relance, les aides au secteur bancaire, le poids des stabilisateurs automatiques ont créé des appels de fonds à des capitaux sans précédent.

De plus, la Fed ou encore la banque centrale d’Angleterre ont procédé aux “quantitative easing”, un instrument de politique monétaire non conventionnelle qui consiste à racheter des bons du Trésor pour faire baisser les taux. Une politique interdite par la BCE.

Mais les Etats et les banques centrales n’avaient pas le choix, ils ont paré à l’urgence. Il fallait combattre à tout prix la déflation.

Le marché de la dette va-t-il continuer à gonfler à ce rythme?

Je ne crois pas que le marché obligataire sera aussi dynamique en 2010 qu’en 2009. Il n’y aura plus les mêmes levées de fonds sur la dette souveraine. Les souscripteurs de ses obligations ont été refroidis, conscients surtout des déficits abyssaux des Etats-Unis et de certains Etats européens au bord de la faillite.

Les investisseurs institutionnels, les fonds de pensions, les entreprises exigeront plus de rendement pour le risque qu’ils prennent. La Grèce doit déjà payer des primes de risques de plus de 2% par rapport aux obligations allemandes.

Pour la France, le cas du grand emprunt est aussi révélateur. Il devait dépasser les 100 milliards d’euros, il a été ramené à 22 milliards (35 milliards au total dont 22 milliards levés sur les marchés, ndlr). La France aurait pu émettre un montant supérieur mais aurait dà» le surpayer en raison du dérapage déjà très important de ses finances publiques. Le déficit public va dépasser plus de 8% du PIB et la dette plus de 80% du PIB. L’agence de notation Fitch avait adressé une mise en garde sérieuse à la France lors de la présentation du grand emprunt.

Cette bulle obligataire va-t-elle exploser?

Non, toutes les bulles n’implosent pas. Certaines se dégonflent passent inaperçu. Pour que la bulle obligataire explose, il faudrait que les taux s’envolent et que les conditions – inflation, reprise cycle économique – soient réunies.

S’il y a des signes de reprise, pour le moment elle est surtout basée sur le sentiment d’euphorie des marchés et la quantité de liquidités sur les marchés. La reprise réelle doit s’accompagner d’un retour à la création d’emplois.

Or, le marché de l’emploi reste peu flexible à la hausse comme à la baisse en zone euro. La création d’emploi ne viendra que tardivement en Europe. Aux Etats-Unis, les signes de reprise sont plus clairs, notamment dans l’immobilier haut de gamme mais le chômage continue aussi d’augmenter.

Quant à l’inflation, même si les Etats en acceptaient un peu pour faire baisser le poids de la dette, elle restera modeste.

En 2010, dans ce contexte européen, la BCE n’est pas prête de relever ses taux et de menacer une reprise fragile ou aggraverait la situation dans certains pays européens qui peinent encore à s’en sortir (Grèce, Espagne Italie, GB). Jean-Claude Trichet réagira avec inertie par rapport au dynamisme de Bernanke.

Enfin, il n’y a pas de risque de non paiement des dettes des Etats. Les européens n’accepteraient pas par exemple que le FMI intervienne dans un pays de la zone euro. Ce serait un grave désaveu pour l’euro.

La tempête semble donc s’être calmée sur le marché obligataire. La bulle va certainement se dégonfler en douceur.

Propos recueillis par Thibaud Vadjoux

http://www.e24.fr/finance/article174020.ece/M.Santi-Les-souscrripteurs-de-la-dette-seront-prudents.html

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