Les leçons du Japon

avril 11, 2010 0 Par Michel Santi

Les économies dites “intégrées” porteront encore longtemps les stigmates de la récession des années 2008 et 2009. Il est cependant un pays – le Japon- qui, se débattant certes depuis une vingtaine d’années contre une insidieuse spirale déflationniste ayant grippé l’ensemble de sa machine économique, serait susceptible d’émerger en premier pour avoir expérimenté quasiment toutes les recettes afin de se sortir de son marasme.

En fait, le pays qui renouera avec une croissance saine et durable sera aussi celui qui aura lutté avec succès contre ses excédents de production.

Les périodes d’euphorie financière et de formation de bulles étant toujours accompagnées de fièvres dépensières de consommateurs gonflés à bloc par une illusion de richesse, elles sont également marquées par des investissements massifs de la part d’entreprises dont le souci est de répondre à une demande supposée s’accroà®tre. Pourtant, les multiples implosions passées des bulles spéculatives ayant fatalement décimé la consommation se sont naturellement traduites par un décalage criant entre un appareil de production démesuré par rapport à une demande anémique.

Par manque de courage politique ou tout simplement faute de vision à long terme, la quasi totalité des économies modernes ont tenté de résoudre cette problématique en faisant appel à des artifices de politique monétaire combinant certaines mesures fiscales censés stimuler la demande. Pourtant, les manipulations sur le front des taux d’intérêts ne permettent pas de réduire de manière permanente ce décalage entre consommation et production contraignant ainsi à terme les entreprises à agir sur la variable de la masse salariale, c’est-à -dire en procédant à des licenciements de plus ou moins grande amplitude!

En pratique, ces mesures adoptées par des Etats qui cherchent à gagner du temps ou qui se trompent de priorités aggravent d’autant plus la crise que ce gap entre consommation et production est important. La réduction des taux d’intérêts – toute agressive qu’elle puisse être – et la mise en place de déductions fiscales – aussi généreuses soient-elles – ne contribuent pas à l’amélioration qualitative et quantitative de la productivité au sein des entreprises. En fait, l’efficience de la quasi totalité de nos entreprises est bridée par leurs capacités de production démesurées.

La réduction de l’appareil de production japonais de l’ordre de 30% permettrait ainsi une amélioration de quelque 4% du P.I.B. national tout en contribuant à une progression des salaires de la population active sans pour autant pénaliser des entreprises qui gagneraient en efficacité. Un démantèlement de cette ampleur se traduirait immanquablement par une augmentation du chômage japonais de l’ordre de 5% faute de réformes structurelles vitales pour stimuler et maintenir sur le long terme la croissance économique. Le nécessaire sacrifice d’une partie de l’appareil de production industrielle améliorant la compétitivité des entreprises se devant d’être contrebalancé par des investissements privés et publics en faveur de secteurs porteurs d’emplois comme l’éducation, la santé, l’agriculture, etc…

L’exemple d’un pays comme le Japon ayant utilisé à outrance toute l’artillerie de la politique monétaire sans pour autant renouer avec une croissance saine est aujourd’hui précieux car il est plus que temps que ce pays – et les nôtres – adoptent de vraies mesures. En fait, les manipulations abusives des taux d’intérêts et autres stimuli fiscaux opportunistes empêchent les indispensables réformes.

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